dimanche 23 septembre 2012

La Noblesse sous l'Ancien Régime entre mythes et réalité


Lorsque l'on est à l'école on apprend que sous l'Ancien Régime, la population était découpée en trois parties :
  • la noblesse qui a des privilèges et qui vit du travail de ses gens et qui, de temps en temps, part en guerre
  • le clergé qui a des privilèges et qui prie pour la salut des âmes 
  • le tiers-état qui n'a pas de privilèges, qui travaille dur et qui paie des impôts 
Loin de moi l'idée de faire du révisionnisme, mais il est certain, et tous les ouvrages l'indiquent, que ce découpage en trois états distincts n'est qu'une vue de l'esprit, car non seulement il existe des passerelles entre eux, mais, et c'est l'objet de cet article, il existe de très importantes disparités au sein des ordres, en particulier celui de la Noblesse.


1) Qu'est ce que la Noblesse ?

Je ne vais me concentrer que sur la période de l'histoire qui va du XVIème au XVIIIème siècle, car c'est pendant cette période que l'on trouve généralement le plus de traces d'ancêtres "nobles".
La Noblesse constitue un ordre et Wikipedia donne une première indication très importante :
La noblesse française, ou la Noblesse de France, n'est pas constituée d'individus, mais de l'ensemble des familles reconnues nobles en France, le plus souvent parce qu'elles tiennent légitimement des domaines nobles (fiefs) ou des emplois nobles (offices) relevant du roi de France ou des grands vassaux de la Couronne.

Durant son existence juridique, qui se termine avec la Troisième République, la Noblesse française n'a jamais été une caste1. La population noble fut toujours renouvelée au cours des siècles.

Depuis la Révolution française, on utilise improprement les mots aristocratie et aristocrate pour désigner la Noblesse et ses membres, d'abord péjorativement comme pouvoir abusif d'un petit nombre, par opposition à la démocratie, ensuite avec un sens devenu positif venu d'Angleterre. Or, si ce mot désigne bien le gouvernement des meilleurs, il n'implique ni de se borner aux activités de la la Noblesse qui étaient très spécifiques, ni un recrutement essentiellement héréditaire.
Les Nobles tiennent donc des domaines ou des emplois relevant du Roi ou des grands Vassaux de la Couronne. En d'autre terme, il peut exister une très grande disparité entre le Duc de Bourgogne, par exemple et Guillaume de Chalus, Seigneur de Chalus et de la Bénéhardière, qui tenait son fief du Roi de France en des temps très lointains mais qui rendit hommage au Seigneur de Mayenne son suzerain le 11 Mais 1463 ...

La Noblesse bénéficie donc de certains privilèges, comme l'exemption de certains impôts, mais en contrepartie, elle devait allégeance à son suzerain.

Après la réforme de la capitation en 1695, le statut de Noble sera encore plus dégradé pour les gentilhommes de province car ils seront fiscalement comparables à des fonctionnaires locaux comme les collecteurs de gabelle ou autre propriétaire de charge.

2) Des disparités importantes

Le personnage central du livre de Rémi Waterhouse Ridicule, Ponceludon de Malavoy est à ce titre l'exemple même de cette Noblesse provinciale, désargentée, vivant dans une demeure seigneuriale inconfortable, et participant avec son régisseur ou ses gens, à la gestion des terres de son domaine.

La plupart de ces Nobles n'avaient jamais vu le Roi et auraient d'ailleurs été fort embêtés de devoir se rendre à Paris ou à Versailles pour le rencontrer. La Noblesse proche du pouvoir, la Noblesse de Cour considérant cette Noblesse rurale avec mépris ...

Les disparités qui existaient au sein de la Noblesse se sont également vues lors de la Révolution Française car, en général, les hobereaux de la campagne de France sont passés à travers les mailles du filet, allant même jusqu'à prendre des responsabilités dans le nouveau régime ! Il n'est en effet pas rare de voir un ancien gentilhomme local devenir le Maire de la nouvelle commune.
On pourrait presque poser l'hypothèse que la "petite" Noblesse de province a plutôt vu la Révolution d'un bon oeil car cette Noblesse de Cour, corrompue et inefficace, qui la méprisait jusqu'à lors laissait sa place ...

3) Les signes de la Noblesse

Certains signes montraient clairement au reste des sujets que les Nobles avaient un statut à part :
  • port d'un titre (écuyer, chevalier, etc.)
  • port d'une arme dans des lieux publics
  • possession d'armoiries
  • pouvoir chasser
  • exemption de la taille et des autres impôts (jusqu'à l'instauration de la Capitation en 1695)
  • avoir la capacité d'être décapité et non pas pendu ou roué en cas de condamnation à mort
Mais la richesse du seigneur dépendant de la richesse de son fief, on comprend très bien la raison des écarts de fortune pouvant exister entre Nobles, d'autant que les emplois lucratifs leur étant interdit, leur seule possibilité de s'enrichir étaient soit de se faire remarquer par leur Suzerain ou un Prince (voire le Roi) et obtenir un fief plus important, soit de faire un beau mariage ...

4) La Réformation de Louis XIV

Le Roi Louis XIV enfant a dû subir l'humiliation de le Fronde. Il s'en souviendra toute sa vie et fera en sorte d'asservir la Noblesse de la Cour ...
C'est ce qu'on apprend à l'école.

Mais ce que l'on sait moins, c'est que dans les années 1668, il fait procéder à toute une série de procès en Réformation dont l'objet était de demander à tous les Nobles du Royaume de justifier de leur Noblesse. Ceux qui en pouvaient pas le faire étaient donc rétrogradés dans la roture.

En revanche, ceux qui pouvaient prouver qu'ils étaient de noble extraction gardaient leur titre et leurs privilèges.
Je parlais précédemment de Guillaume de Chalus, et bien son descendant Jean de Chalus vivait en 1668, et il est écrit dans le procès-verbal de Réformation du 19 Juin 1668 :
Messire Jean de Chalus
avait pour ancêtre Guillaume de Chalus, Seigneur de Chalus et de la Bénéhardière
Lequel rendit hommage au Seigneur de Mayenne le 11 mai 1463
"à cause du comté dudit lieu, pour raison de la haute et moyenne justice
que ledit de Chalus avait en sa terre de la Bénéhardière"
Il porte pour armes :
"d'Azur à trois croissants d'argent"



La présence d'ancêtres Noble, surtout s'il s'agit de petits hobereaux de province, permet souvent de faire un bond en arrière grâce à différents actes ou documents généralement bien conservés car les familles pouvaient être amenées à justifier de leur état.
Cependant, certaines généalogies anciennes sont assez fantaisistes car il n'était pas rare que, moyennant finances, on trouvât un généalogiste ou un héraldiste peu regardant et créatif !

Et vous, avez-vous pu trouver des ancêtres Nobles dans votre généalogie ?

Pour aller plus loin : 
           

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