vendredi 21 septembre 2012

Les Peyrard une dynastie Stéphanoise

Il y a deux ans environ, je décidais de prendre mon courage à deux mains et de plonger dans une branche que j'avais peu explorée, qui est celle de mon grand-père paternel.

Je savais qu'il venait de Saint-Etienne et cela me rebutait un peu car, Saint-Etienne est une grande ville et moi qui était habitué aux recherches dans les petits villages de France, je craignais d'affronter les monceaux d'archives de cette cité.


Cependant, il m'est vite apparu que cela avait un avantage qui était une documentation assez complète et avec des promesses de pouvoir remonter assez loin.

1) Acte I - Jeanne Daveze (1745-1809)

C'est ainsi que j'ai trouvé un certain Jacques Desfond (dont j'ai déjà eu l'occasion de parler dans l'article "Mais qui était Pierre Joseph Leclerc ?"), né paroisse Notre-Dame de Saint-Etienne le 24 novembre 1746 et décédé à Saint-Etienne le 6 avril 1803.
Entretemps, il avait épousé Jeanne Daveze le 4 février 1766, également paroisse Notre-Dame de Saint-Etienne.

L'acte de mariage était assez étonnant (pour moi) :

Jacques Desfons, garçon teinturier de soie à St Etienne, y demeurant paroisse St Etienne, fils légitime d’autre Jacques Desfons, garçon teinturier à St Etienne y demeurant paroisse Notre-Dame et de défunte Claudine Clavenas, âgé d’environ vingt ans, procédant de l’autorité de son dit père ici présent d’une part
Et Jeanne Daveise, fille légitime de Léonard Daveise, forgeur à St Etienne paroisse de Notre-Dame et de Jeanne Champaley, âgée d’environ vingt ans, procédant de l’autorité de son dit père ici présente d’autre part.
Suivant le contrat du onze janvier mil sept cent soixante six reçu par m° Arnaud, notaire royal à St Etienne, lesquels dûment publiés trois fois aux prônes de nos messes paroissiales, sans avoir découvert aucun empêchement canonique ni civil reçu la remise de M° Arnaud, vicaire de la paroisse de St Etienne en date du … février susdite année ont été unis par le sacrement de mariage et ont reçu la bénédiction nuptiale dans l’église paroissiale Notre-Dame par moi vicaire soussigné le quatrième février susdite année en présence de François, Antoine Lefevre, de François et Jean Denis Soupat, tous armuriers de cette paroisse qui ont signé avec l’époux, non l’épouse ni les autorisants qui ont déclaré ne le savoir, de ce enquis.

                                                                                              F LEFEVRE
                        JACQUES DESFOND                     SOUPAT        JEAN DENIS SOUPAT
                                   ANT LEFEVRE


En effet, un garçon teinturier épousait une fille de forgeur. 
A notre époque, cela ne serait même pas relevé, mais dans les témoins, on trouvait 4 armuriers et un forgeur du côté de la mariée et des teinturiers du côté de l'époux. Curieux mélange.

Cela m'a effectivement fait réalisé que Saint-Etienne était la ville qui hébergeait jusqu'à il y a peu une manufacture d'armes, mais j'ignorais que le travail des armes fût aussi ancien.

Je décidais donc de m'intéresser à Jeanne Davèze. Pour deux raisons :

  • premièrement parce que je voulais en savoir plus sur ces forgeurs amis ou en tout cas en relation avec des armuriers
  • deuxièmement parce qu'il existe au centre de Saint-Etienne un Parc du Bois d'Avaize. La ressemblance avec le nom de mon aïeule m'a interpellé ...

2) Acte II - Léonard Davèze (1707-1766/1787) et Jeanne Champaley (1717-1787)

Jeanne Davèze est née le 3 avril 1745 et a été baptisée dans l'église Notre-Dame de Saint-Etienne. Et elle est décédée le 13 novembre 1809 à Saint-Etienne après avoir donné 12 enfants au Royaume dont l'aînée de qui je descends et qui est née 9 mois et quelques jours après le mariage de ses parents ...

Ses parents étaient :

  • Léonard Davèze, né le 16 janvier 1707, paroisse Saint-Etienne de Saint-Etienne et décédé entre 1766 et 1787 (impossible pour le moment de mettre la main sur son acte de décès)
  • Jeanne Champaley, née le 9 juillet 1717, paroisse Notre-Dame de Saint-Etienne et décédée le 26 juillet 1787
Rien, dans les actes que j'ai à ma disposition ne donnait plus d'informations sur Léonard Davèze (dont le lieu et la date de décès restent toujours un mystère).

La seule information que j'ai trouvée à ce jour est un site internet répertoriant les marques de tous les forgeurs de fiches Stéphanois et ici se trouve la trace de celle de Léonard Davèze "Patronyme surmonté d'un L en majesté flanqué de deux fleurs de lys posées debout". Il y a toujours quelque chose d'émouvant à voir un objet façonné par un de ses ancêtres !

Pour information, le Bulletin du Vieux-Saint-Etienne publie toutes les recherches sur ce sujet d'où dont d'ailleurs tirées les informations précédentes. A visiter pour les amoureux des vieux métiers !

En revanche, j'ai trouvé, grâce à l'acte de baptême de Léonard Davèze qu'il était issu de la paroisse Saint-Etienne (une des deux composant l'actuel Saint-Etienne) du mariage de Benoît Davèze et de Claudine Peyard.

Léonard, fils naturel et légitime de Benoist Daveze et de Claudine Perard, ses père et mère, né le jour d’hier, a été baptisé dans l’église de St Etienne par moi vicaire soussigné ce jour seizième janvier mil sept cent sept.
Son parrain a été Léonard Catinat et sa marraine Anne Davet.
Le tout en présence des soussignés.

                                               F FORAND                                       L JALLE


Cet acte, fait partie de ces actes qui accélèrent les battements cardiaques au moment où on les trouve.
En effet, je me souvenais avoir lu un article sur un certain André Peyrard, faiseur de fiches à Saint-Etienne au XVIIème siècle et dont la marque ornait des fiches présentes dans un immeuble parisien appartenant à la Sorbonne ...

Et s'il y avait un lien ?

3) Acte III - Claudine Peyrard (1681 - 1749)

Je m'intéressais donc tout naturellement à Claudine Peyrard dont l'homonymie avec le Peyrard cité dans ce texte m'intriguais.

L'acte de de Claudine Peyrard semblait me confirmer ce que j'avais imaginé :
Ce jourd’hui six août mil sept cent deux, je soussigné, après trois proclamations faites trois jours de dimanches et fêtes sans qu’il soit intervenu aucun empêchement canonique, ai donné la bénédiction nuptiale à Benoît Daveize, fils légitime de Pierre Daveize, laboureur du lieu de Jacod, de cette paroisse et de Catherine Brun, âgé d’environ vingt quatre ans et dûment autorisé par son père ici présent d’une part
Et à Claudine Peyrard, aussi fille légitime de défunt André Peyrard et de Claudine Veyron, âgée d’environ vingt deux ans et dûment autorisée par François Peyrard son oncle ici présent d’autre part.
Après avoir reçu leur mutuel consentement en présence de Denis Daveize, cousin dudit époux, de Rembert Daveize, aussi cousin de l’époux, de Pierre Daveize et d’autres parents et amis, les parties ont signé lesdits Denis et Rembert Daveize et les autres témoins avec les parties ont dit ne savoir.

                        DENIS DAVEZE
Je trouvais en effet que Claudine Peyrard était la fille de défunt André Peyrard et de Claudine Veyron. 

Or le texte dont je parlais précédemment et dont voici la transcription disait :


Il s’agit ici d’un cas particulièrement exceptionnel dans le recensement de l’authentique existant. La découverte d’une fiche estampée au nom d’A. PEYRARD précédée d’une fleur de lys nous apporte la preuve de l’authenticité du châssis. La vie d’André Peyrard, fils de Gabriel Peyrard, faiseur de fiches, et de Madeleine Mussieu, est bien connue grâce aux archives locales. Baptisé à la Grand’Église de Saint-Étienne le 23 mars 1642, André Peyrard s’est marié deux fois. Le 24 août 1666, il épouse Claudine Veyron, fille du fichaire Claude Veyron et de Catherine Chapelon, en présence de Jean Peyrard, « faiseur de fiches ». Veuf, il convole en secondes noces avec Madeleine Hastier le 20 juillet 168l. À défaut de l’acte de catholicité stipulant la première union, le contrat de mariage passé chez le notaire Bessonnet l’après-midi du 24 août 166615 restitue sur trois folios les usages du temps. Outre la somme de 240 livres, la fiancée apporte en dot « la jouissance d’une boutique et d’une cuisine situées derrière la maison que son père possède sur la rue Polignais à Saint-Étienne », cela « pour une durée de quatre années consécutives », c’est-à-dire le temps au futur époux de s’affirmer dans son métier. Assistent au mariage Pierre Caure, maître graveur de gardes d’épées, Jean Peyrard, forgeur de fiches et frère de l’époux, les deux maîtres couteliers Claude et Jean Chappelon (ce qui révèle la proximité des deux professions) et enfin les inévitables marchands Antoine Dussaulze et Louis Buisson, aux paraphes aussi talentueux que leurs « négoces ».
Il s'agissait donc bien du même André Peyrard !

Ainsi, la piste des forgeurs de fiches, ou des faiseurs de fiches était non seulement avérée, mais également je disposais de la preuve qu'une véritable dynastie de faiseurs de fiches, de forgeurs et de couteliers existait au XVIIème siècle à Saint-Etienne.
Cela me faisait découvrir ces métiers dont j'ignorais l'existence avant cette découverte (les fiches étaient en quelque sorte les ancêtres des gonds et des paumelles des portes, fenêtres et volets, et leur fabrication était très complexe et surtout localisée dans la région de Saint-Etienne).

J'ai également découvert qu'il y avait une erreur dans l'article de la revue citée plus haut car Claudine Peyrard est née le 30 novembre 1681 comme en atteste son acte de baptême : 
Ce jourd’hui dernier du mois de novembre mil six cent quatre vingt un a été baptisée Claudine, fille à André Perar, fourgeur et à Claudine Veron, ses père et mère.
A été parrain Jean Nycolas, maître graveur et marraine Claudine Jacotton.
Le tout en présence des soussignés.

                                   DAVEZE                   NICOLAS

André Peyrard ne peut donc pas avoir épousé Madeleine Hastier le 20 juillet de la même année, à moins d'être devenu polygame ...

Il s'agit en revanche bien du même André Peyrard dont l'acte de baptême est assez intriguant (et très difficile à décrypter - pour les courageux, on peut le trouver sur les archives en ligne de la ville de Saint-Etienne, paroisse de Saint-Etienne pour l'année 1642 côtes 3NUMRP7/2 MI EC 6 - Feuillet 45)
Ce jourd’huy vingt troisième mars 1642 a été baptisé André, fils à Gabriel Peyrard, f… de Saint Etienne et Furan, et Magdelaine Mussieu.
A été parrain Mr André Varullier, avocat et t… sa… au bourg procureur du Roi et marraine Damoiselle Anthoinette Jos, fille de Mr Jean Baptiste Jos, juge de m… et p… baronnie de Saint Etienne …

VAROLLIER parrain
En effet son parrain était avocat et Procureur du Roi et sa marraine fille du Juge près la baronnie de Saint-Etienne ... Du beau monde qui laisse à penser que la famille Peyrard était respectée et honorable.

4) Acte IV - Pour conclure ... pour le moment

Pour terminer ce tableau, il faut savoir que du côté de Jeanne Champaley on trouve une dynastie de canonnier et de maîtres canonniers. Encore le travail du métal et de la fonderie. Mais c'est une autre histoire ...

Cela m'a appris beaucoup de chose :
  • sur les métiers d'abord. Avant de commencer ces recherches je n'imaginais pas à quel point les métiers pouvaient être spécialisés. Par exemple pour une épée, il y avait ceux qui faisaient la lame, d'autres la garde, d'autre le fourreau, etc.
  • sur les trouvailles d'internet. Internet est une formidable base de données qui permet de découvrir des pans entiers de la vie de nos ancêtres
  • sur cette notion de dynastie que j'avais du mal à cerner au départ. Mais lorsque l'on trouve des filles de forgeurs épousant des forgeurs ou que des fils de forgeurs épousent des filles de forgeur, qui sont pris en apprentissage chez leur beau-père, etc. on peut presque visualiser un écosystème passionnant



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