mardi 30 juillet 2013

En latin dans le texte


Je le disais dernièrement, mes recherches m'ont conduit à découvrir l'acte de baptême de Catherine Boullain, le 20 mars 1605 à Changé-lès-Laval (Mayenne). Jusque là, rien que de très normal, si ce n'est peut-être l'ancienneté de l'acte car, il n'est pas hélas si fréquent de pouvoir plonger dans des registres aussi anciens.

La vraie nouveauté pour moi était de découvrir un acte en latin !

Je me souviens en effet de mon excitation la première fois que j'ai trouvé un acte datant de la période révolutionnaire : je voyais pour la première fois un texte manuscrit parlant de "citoyen", de mois en -ôse et d'année républicaine.

Puis, chemin faisant, ce type d'acte devint courant, au fur et à mesure que mes recherches avançaient.

Un jour arriva où je franchis la barre symbolique (pour moi) de l'année 1700. Je voyais des textes datés de 1600 et quelques et, au départ surpris par la graphie de ces documents, je finissais par m'habituer. Les moments les plus pénibles de cette phase étaient quand je me confrontais à la disparition brutale de sources aux environs de l'an 1668 (les généalogistes savent pourquoi ...). Evidemment, avant cette date, bien que l'ordonnance de Villers-Cotterêts l'exigeât depuis 1539, l'inscription sur des registres des baptêmes, mariages et sépultures restaient généralement à la discrétion du curé.

Scène de baptême


Toutefois, quelques curés bien attentionnés (surtout dans le nord-ouest du Royaume), tenaient régulièrement des registres. Mais le temps ayant fait son oeuvre, ils étaient souvent lacunaires et il m'était impossible de remonter au-delà des années 1630-1640.

Pourtant, je me prenais à rêver à cette époque où je pourrai tenir dans mes mains (ou en tout cas voir sur mon écran), un acte antérieur à 1600, autre barrière symbolique !

Seulement, j'avais oublié une chose : dans ces régions de l'ouest, les actes étaient rédigés en français seulement depuis les années 1610-1620 (donnée imprécise qui n'engage que moi et qui est le constat que j'ai fait sur les quelques paroisses que j'ai étudiées), avant, le latin était la langue officielle des actes !

Je dois avouer que la lecture de l'acte de baptême de Catherine Boullain a été pour moi un moment de rare bonheur (les généalogistes qui me lisent savent de quoi je parle) car, à la joie d'avoir trouvé un acte complétant ma généalogie, je lisais un acte datant du règne d'Henri IV et rédigé dans cette langue qui est qualifiée de "morte" depuis des années.

Poussé par mes recherches, j'ai trouvé d'autres actes de baptême (mes recherches m'ont montré que ce sont souvent les baptêmes qui étaient notés, les sépultures et les mariages semblant secondaires; peut-être parce que le baptême permet de sauver l'âme et est donc réellement fondamental ?) et j'ai constaté que les actes étaient finalement très similaires.

Ainsi, moyennant quelques connaissances de base sur les nombres ordinaux et cardinaux, sur les mois et les jours, la lecture d'actes de baptême en latin ne pose pas de réelles difficultés. Voici donc quelques données à connaître pour s'y retrouver.

1) Structure de l'acte

Les actes de naissance sont finalement très simples.

Ils contiennent la date, le nom de l'enfant, celui de ses parents et de ses parrain et marraine. Eventuellement, on trouvera le nom du curé ayant réalisé le baptême, mais cela n'est pas systématique.

Un acte basique aura donc la forme suivante :

Le <jour, mois, année> a été baptisé(e) <prénom du ou de la baptisé(e)> fils/fille de <prénom et nom du père> et de <prénom et nom de la mère> sa femme, nommé(e) par <prénom et nom du parrain> et <prénom et nom de la marraine>

2) Quand les femmes n'existaient qu'à travers les hommes

Le problème est que sur les actes anciens (pour ce que j'ai pu voir, avant 1610), la femme n'existait qu'à travers son mari ou son père. En d'autres termes, ne figurait sur l'acte que son prénom suivi d'une mention indiquant de qui elle était la fille ou l'épouse.

On aura par exemple la locution "et a Johanna eius uxoris" qui signifie "et à Jeanne son épouse". Ce qu'il faut espérer c'est que le couple aura plusieurs enfants et que sur les actes de baptême les plus récents figurera son patronyme, ce qui donnera par exemple "et a Johanna Fournier uxor" qui signifie "et à Jeanne Fournier, épouse".

3) Un peu de vocabulaire utile

Le vocabulaire de base à connaître par coeur pour lire un acte de baptême en latin est assez restreint. Pour une liste assez complète qui donne également les nombres ordinaux et cardinaux ainsi que les jours de semaine, les mois ou tout le vocabulaire traitant des baptêmes, mariages et sépultures, vous pourrez aller sur le site de Geneafrance qui est très bien fait.

Sinon, pour les baptêmes, on retrouve toujours :

"Dies <quantième> mensis <mois> anno domini <année>" ou
"Dies <quantième> mensis <mois> anno ut supra"où "anno ut supra" signifie "année que dessus", lorsque le curé ne voulait pas s'embêter à indiquer l'année ...

"Baptisatus ou baptisata fuit" qui signifie "fut baptisé ou fut baptisée"

"Renatus ou renata" qui signifie littéralement "re-né ou re-née" car pour les chrétiens le baptême est une renaissance où on devient un nouvel homme ou une nouvelle femme. On peut traduire cela par "nommé(e)" car le fait de renaître dans le baptême est symbolisé par le fait d'avoir un nouveau nom. Cette mention "renatus" ou "renata" pour les filles précède la mention des noms des parrain et marraine.

Enfin, on retrouve les mots "uxor" épouse, "filius" fils ou "filia" fille pour désigner la statut de la personne citée dans l'acte.


4) Cas pratique, Catherine Boullain, baptisée le 20 mars 1605

L'acte de baptême de Catherine Boullain est, en version originale :

Source AD Mayenne


Sa transcription donne :

"Vigesima mensis martii anno ut supra
baptisata fuit katharnia mathei
boullain et a johanna fournier uxor
filia renata magister boullain vicario et
a katharnia michaeli fournier uxor"

Autrement dit, littéralement :

"le vingtième du mois de mars, année comme dessus
fut baptisée catherine de mathieu
boullain et de jeanne fournier épouse
la fille, re-née par maître boullain curé et
catherine de michel fournier épouse"

Ou, en francisant le tout :

"le vingt mars de l'année ci-dessus (1605)
fut baptisée Catherine fille de Mathieu Boullain
et de Jeanne Fournier son épouse
nommée ainsi par maître Boullain curé et
par Catherine, épouse de Michel Fournier"


Et voilà, vous êtes maintenant prêt à plonger dans les actes des années 1600 et, pourquoi pas, de la seconde partie du XVIème siècle !

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Pour aller plus loin : 

           

mardi 23 juillet 2013

La technique de l'encerclement


Quand on a la chance d'avoir des ancêtres qui ont vécu dans la même paroisse pendant plusieurs générations, c'est déjà une très bonne nouvelle. Quand en plus un érudit du XIXème siècle a eu l'idée de faire une étude complète sur la paroisse en question, c'est le bonheur. Et quand, en plus, les registres paroissiaux sont tenus presque sans interruption entre 1583 et nos jours, on frôle l'extase.

Cependant, tout n'étant jamais parfait, il se peut qu'il existe certains lacunes dans les registres. Et, fait du hasard, de la malchance ou de loi de Murphy, c'est précisément dans ces zones lacunaires que doit se trouver l'acte qu'on recherche.

Si la famille est là depuis plusieurs générations et qu'elle est bien établie au point d'occuper les postes importants de la paroisse (fermier, procureur, marguillier, etc.) il est peu probable que la personne dont on cherche l'acte soit née, se soit mariée ou ait été enterrée ailleurs. Il faut donc se faire une raison, on ne disposera jamais de son acte. S'il s'agit d'un acte de naissance, on ne connaîtra jamais avec certitude le nom de ses parents, s'il s'agit de son acte de mariage, même chose, etc.

Pourtant, il existe une technique simple, celle de l'encerclement.



Elle consiste "tout simplement" à encercler l'ancêtre par ses enfants, sa fratrie et ses parents. Une fois entourée par ces trois générations, on pourra se faire une idée assez bonne de la personne concernée, même si on ne dispose pas de tous les actes.

Cas pratique

En partant de mon arrière-grand-mère maternelle, Marie Eugénie Mathilde Girault, née le 29 août 1894 à Chailland dans la Mayenne du mariage de Eugène François Girault et Euphrasie Zoé Alexandrine Trochon, je suis remonté sans aucune difficulté à François Levêque, né le 2 octobre 1663 à Changé-lès-Laval du mariage de Michel Levêque, marchand tissier et de Françoise Beuscher.


Ledit François Levêque est cité dans l'ouvrage de Louis-Marie-François Guiller "Recherches sur Changé-lès-Laval" paru en 1882, ce qui donne quelques informations utiles sur sa vie. Issu d'une famille aisée de marchands tissiers, il sera élu procureur de la fabrique et gèrera donc les comptes de la paroisse pendant plusieurs années.

Si, concernant François Levêque on dispose de toutes les informations de base (naissance le 2 octobre 1663, mariage avec Françoise Cordier le 18 février 1692 et décès le 18 février 1711), on a moins d'informations concernant ses parents et surtout sa mère, Françoise Beuscher.

Là aussi on tombe sur une famille ancienne de Changé-lès-Laval puisqu'un François Beuscher y était prêtre de 1630 à 1668. Seulement, sur Françoise Beuscher on ne trouve pas grand chose car son acte de mariage se trouve précisément (en théorie) dans la période lacunaire allant de 1614 à 1675.

Alors comment faire ? L'encercler !

 Comme je dispose des registres de naissance dans leur intégralité et qu'une bonne âme a eu l'excellente idée de réaliser des tables annuelles des baptêmes, mariages et sépultures, je commence par chercher tous les enfants du couple Michel Lévêque - Françoise Beuscher.

François Levêque leur fils étant né en 1663, je commence par chercher autour de cette date en me fixant un premier périmètre de recherche de 1650 à 1663.

Je trouve :
  • Françoise, née le 10 mars 1658
  • Michel, né le 22 décembre 1659
  • Jean, né le 30 septembre 1661
  • François, né le 2 octobre 1663
Ce n'est qu'une hypothèse pour le moment, mais dans la mesure où je n'ai pas trouvé d'enfants du couple entre 1650 et 1658, et que les deux premiers enfants du couple portent les prénoms de leurs parents, je suppose que Françoise est la première fille du couple.

Quand je regarde les parrains et marraines des enfants, je trouve aussi des choses intéressantes :
  • Françoise a pour parrain Maître François Beuscher, prêtre et pour marraine Perrine Juppin
  • Michel a pour parrain Honorable Homme Thomas ... et pour marraine Guyonne Beuscher
  • Jean a pour parrain Jacques Beuscher et pour marraine Jeanne Brillet
  • François a pour parrain François Levêque et pour marraine Catherine Beuscher

Chaque enfant a un parrain ou une marraine issue de la famille Beuscher, qui tous semblent par ailleurs être de la paroisse car le curé n'a pas indiqué qu'ils venaient d'ailleurs.

On peut donc imaginer que Françoise Beuscher s'est mariée avant 1658, mais pas tellement avant.

Si je prends maintenant l'hypothèse qu'elle avait au moins 15 ans le jour de son mariage, cela la fait naître avant 1643.

Etape 2 : la fratrie

Je passe donc à la seconde étape de l'encerclement et je recherche, dans la paroisse, la liste des Beuscher nés entre 1625 et 1643 (dans un premier temps), pour trouver des fratries contenant une Françoise dans leur rang.

Je trouve ceci :
  • Perrine, née le 2 mai 1625 de Michel Beuscher et Jeanne Boisard
  • Mathieu, né le 16 février 1626 de Jean Beuscher et Catherine Boullain
  • Suzanne, née le 5 juin 1627 de Jean Beuscher et Catherine Boullain
  • Marie, née le 10 août 1629 de Jean Beuscher et Catherine Boullain
  • Françoise, née le 7 mai 1631 de Jean Beuscher et Catherine Boullain
  • Guyonne, née le 24 avril 1633 de Jean Beuscher et Catherine Boullain
  • Catherine, née le 20 juin 1635 de Jean Beuscher et Catherine Boullain
  • Jeanne, née le 23 février 1637 de Jean Beuscher et Catherine Boullain
  • Jean, né le 24 février 1638 de Jean Beuscher et Catherine Boullain
  • Roberde, née le 29 septembre 1638 de Jean Beuscher et Jeanne Roustin
  • Jean, né le 29 octobre 1639 de Jean Beuscher et Jeanne Roustin
  • Etienne, né le 21 mars 1640 de Michel Beuscher et Jeanne Padrin (?)
  • Etiennette, née le 23 juillet 1641 de Michel Beuscher et Jeanne Padrin (?)
  • Jacques, né le 29 juillet 1642 de Jean Beuscher et Catherine Boullain
  • Marguerite, née le 5 avril 1643 de Michel Beuscher et Jeanne Padrin (?)
On relève donc 4 fratries issues des mariages suivants :
  • Michel Beuscher avec Jeanne Boisard
  • Jean Beuscher avec Catherine Boullain
  • Jean Beuscher avec Jeanne Roustin
  • Michel Beuscher avec Jeanne Padrin 
Mais parmi ces couples, un seul retient mon attention, celui formé par Jean Beuscher et Catherine Boullain. En effet, il semble avoir des enfants de manière continue sur une période allant de 1626 à 1638 et un petit dernier en 1642, dont une fille prénommée Françoise.

Par ailleurs, cette Françoise Beuscher a des soeurs qui se prénomment Guyonne et Catherine et un frère qui se prénomme Jacques.

Or les Guyonne, Catherine et Jacques sont de bons candidats pour être les parrain et marraines des enfants que Françoise Beuscher a eus avec Michel Levêque (il semblerait assez logique qu'elle prenne dans ses frères et soeurs pour trouver des parrain et marraines pour ses enfants).

Enfin, dernier indice, la Françoise Beuscher trouvée par cette méthode est née en 1631. Ce qui lui donne un âge cohérent avec une naissance d'enfant en 1658 car elle aurait 27 ans.

Cette étape m'a donc permis d'identifier une fratrie contenant une Françoise Beuscher pouvant être MA Françoise Beuscher. D'autant que c'est la seule fille se prénommant Françoise.

Elle m'a également permis d'identifier les parents potentiels de celle-ci et donc de remonter une génération de plus.

L'encerclement est presque terminé car pour compléter le tout, il faudrait que je trouve les éventuels actes de mariage des frères et soeurs de ladite Françoise Beuscher et leurs actes de sépulture. Peut-être trouverai-je alors la preuve ultime du style "témoin, Michel Levêque, beau-frère du défunt ..."

Petite synthèse

En tout cas, je pars sur l'hypothèse que Françoise Beuscher, le sosa possible de mes enfants 6065 est née le 7 mai 1631 à Changé du mariage de François Beuscher et Catherine Boullain, qu'elle s'est mariée entre 1646 et 1658 (et probablement vers 1657) avec Michel Levêque.

Mais cette méthode m'a également permis de trouver une foule de renseignements sur la famille de Françoise Beuscher, ce qui n'est pas rien.

Accessoirement, cela m'a davantage familiarisé avec la graphie du début du XVIIème siècle et, en appliquant cette méthode aux parents supposés de Françoise Beuscher, j'ai trouvé ce que je pense être l'acte de baptême de Catherine Boullain sa mère, rédigé en latin. J'avoue que c'est la première fois que ça m'arrive !

Pour terminer ce billet en apothéose, en voici la transcription (et la traduction : je n'imaginais pas avoir tant de restes ...) de cet acte daté du 20 mars 1605 :

Vigesima mensis martii annus supra baptisata fuit Catharina, Mathi Boullain et a Johanna Fournier uxor, filia renata magister Boullain vicario et a Catharina Michael Founier uxor.

J BOULLAIN

Soit :

Le vingtième du mois de mars de l’année ci-dessus (1605), fut baptisée Catherine, fille de Mathieu Boullain et de Jeanne Fournier sa femme, nommée par Maître Boullain, prêtre et par Catherine, femme de Michel Fournier.

Pour les puristes, il se trouve à la vue 112 des registres en ligne de Changé-lès-Laval de 1583-1614.

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Pour aller plus loin : 



           

mardi 16 juillet 2013

Vacances, vous avez dit vacances ?


Les vacances, qu'elles soient en été ou en hiver sont un moment à part. En effet, qu'on soit amateur ou professionnel en généalogie, c'est un moment pendant lequel on se rend disponible pour sa famille. Mais, dans le cas de la généalogie, s'agissant d'une passion ou en tout cas d'un hobby très prenant, il est très difficile, voire impossible de complètement s'arrêter.

Alors comment concilier vacances (et donc disponibilité pour ses proches) et généalogie ?


Une mise à plat de ses recherches

Tout d'abord, il faut considérer deux cas : soit on reste chez soi en vacances, soit on part. Si on reste chez soi, on sera dans son environnement de "travail" et il sera souvent très tentant de se réfugier dans ses recherches. En revanche, si on part, surtout si le lieu de vacances est coupé du monde, il sera beaucoup plus difficile de continuer ses recherches.

Mais les vacances peuvent être un moment privilégié pour mettre à plat son travail et faire un point d'avancement sur ses recherches. En effet, on peut avoir tendance à papillonner et passer d'une paroisse à l'autre au gré des découvertes. Le souci c'est qu'ensuite on peut perdre le fil et se retrouver face à des impasses, tout simplement parce qu'on n'a pas relevé suffisamment d'informations au sujet de l'ancêtre sur lequel on bloque.
Il est donc bon de faire une synthèse pour savoir où on en est de ses recherches et se préparer pour la rentrée.

Tout ce travail de mise à plat ne nécessite même pas un ordinateur ou une tablette, quelques fichiers imprimés pourront faire l'affaire et on pourra alors faire ce travail tranquillement allongé sur la plage ou au bord de la piscine.

Bien préparer ses vacances !

Ce qui signifie autre chose : les vacances cela se prépare ! Il faut préparer ces synthèses, imprimer les arbres ascendants ou descendants, regrouper ses notes, etc.. Et cette préparation peut également être un bon moyen pour identifier les branches laissées en déshérence en se disant que c'est sur celles-ci que l'effort doit être porté.

Quelques visites ...

Mais les vacances peuvent également être un prétexte pour se rendre sur les lieux où vos ancêtres ont vécu. Certes, cela suppose l'accord de votre conjoint (voire de vos enfants), car tout le monde ne partageant pas forcément votre passion, il faut pouvoir les convaincre ... Cela peut toutefois être un moment intéressant car on peut alors partager ses recherches en famille et leur donner un aspect concret.

... des rencontres ...

Ce peut également être un moment de rencontres. Je me souviens qu'il y a quelques années, j'avais mis à profit quelques congés pour aller dans le village où avaient vécu mes ancêtres dans la branche paternelle de l'Oise et j'avais rencontré une vieille femme qui avait bien connu ma grand-mère.

... ou un passage aux archives !

Une alternative aux rencontres ou aux visites des lieux où vos ancêtres ont vécu, peut être la visite des archives locales (mairies, départements ou évêchés). Ce peut être une occasion unique de fouiller dans des archives non disponibles en ligne, mais avec un risque majeur : celui de passer ses vacances à cela ... Or, à moins d'être célibataire et sans enfant, il est très compliqué (et risqué ...) de passer ses vacances à faire des recherches !

Vous pouvez donc profiter de ces occasions, mais il ne faut pas abuser de cette possibilité ...

Mais on peut aussi lire

Enfin, si vous ne pouvez pas vous déplacer dans les lieux de vie de vos ancêtres, que vous n'avez pas eu le temps de préparer vos dossiers pour effectuer une synthèse ou que vous ne pouvez pas vous rendre dans les archives départementales, les mairies ou les évêchés sans risquer le divorce, il reste la lecture. Que ce soient des livres traitant de la généalogie, d'histoire locale ou des monographies, les vacances permettent de prendre le temps de lire ! Alors il ne faut pas s'en priver. Et même si vos recherches n'avancent pas pendant ces vacances, au moins, vous en saurez davantage sur telle paroisse ou région !


Il existe donc de multiples façons de passer des vacances qui concilient vie familiale et généalogie, tout étant une question d'organisation, de préparation et de dosage. Cependant, faire un break de quelques jours est toujours salutaire car cela permet de remettre de l'ordre dans sa tête et peut-être qu'à votre retour, des énigmes qui étaient insolubles avant de partir trouveront leur réponse à votre retour !

Et vous, comment comptez-vous passer vos vacances ?

Pour aller plus loin : 


           

mardi 9 juillet 2013

La Der des Ders


Nous sommes à l'aube de commémorer le centenaire du début de la Première Guerre Mondiale et il est probable que pendant les années à venir nous allons découvrir un grand nombre de documents consacrés à cette effroyable boucherie qui en l'espace de 4 années a tué plusieurs millions de personnes.

Mais quand je pense à ces années terribles, je réalise que ma génération est la dernière qui a connu des témoins directs de ces événements. Mes enfants ne connaîtront cette guerre que par des récits filmés, des films ou des écrits. Il est donc de mon devoir de leur transmettre ce que les anciens m'ont donné pour qu'à leur tour ils sachent ...

La der des ders ?


J'ai eu à plusieurs reprises l'occasion de parler de mon arrière-grand-mère maternelle que j'ai très bien connue et qui, née en 1894 a eu 20 ans en 1914. Tandis qu'elle restait dans sa maison, d'abord seule, puis en 1917, avec une petite fille, son mari, un professeur de lettres, était sur le front, vivant ces 4 années au rythme des permissions.

Je ne vais pas m'étendre sur la vie de ce couple qui a eu 3 enfants dont un décéda à 11 ans dans des circonstances dramatiques. Le propos de ce billet est de montrer que dans les guerres, il y a ceux qui se battent et qui meurent et il y a ceux qui se battent et qui survivent.

Mon arrière-grand-père maternel fait partie de cette dernière catégorie.

Une vie qui aurait pu être normale ...

Pierre Ernest Vautier est né le 4 mars1892 à Bourg le Roi dans la Sarthe du mariage de Pierre Louis François Vautier, clerc de notaire et de Ernestine Léontine Decongé.
Il est leur seul enfant.

La famille Vautier est enracinée dans la Sarthe et le plus ancien Vautier trouvé à ce jour était Meunier au Moulin de Maleffre au XVIIème siècle. La famille paternelle de Pierre Ernest est donc relativement aisée.
Quant à la branche Decongé, elle s'arrête avec son arrière-grand-père né de parents inconnus le 14 avril 1809 à Alençon ...

Après quelques années d'études littéraires, Pierre Ernest devient professeur de lettres, métier qu'il exercera jusqu'à sa retraite, en passant toutefois quelques années par la case de proviseur de lycée. Il décèdera le 27 avril 1959 à Lille des suites de ses blessures reçues pendant la première guerre.

Et vint la guerre ...

La guerre, surtout la Première Guerre Mondiale a plongé des hommes dans l'horreur pendant 4 années et ceux qui en sont sortis en ont été marqués à jamais.
Marqués psychologiquement car voir ses camarades mourir à côté de soi et côtoyer leurs cadavres pendant des semaines est une expérience terrible.
Marqués physiquement car certains sont revenus vivants certes, mais avec une "gueule cassée" ou, comme dans le cas de mon aïeul, avec les poumons brûlés par l'ypérite.

J'ai plusieurs photographies de cet homme et son visage porte, je le trouve, les stigmates de la guerre.

Mes aïeux Marie Eugénie et Pierre Ernest en 1914
En 1914, mon aïeul est un jeune homme de 22 ans. Il a les traits fins mais on ne voit pas de sourire sur son visage. Il ne faut pas y voir de pressentiment, mais sans doute une inquiétude car son père lui a parlé de la guerre de 1870 et il sait ce que se battre veut dire au travers de ces récits. Cependant, comme beaucoup de ses contemporains, il s'attend sans doute à quelques semaines de combat au plus ...

Pierre Ernest vers 1930
Vers 1930, c'est un homme marqué qu'on retrouve. Même si ses trois enfants et sa femme sont en bonne santé et grandissent bien, il porte déjà sur son visage les traces d'une guerre à laquelle il aura participé 4 ans ...

Pierre Ernest vers 1940
Son dernier enfant est décédé dans des conditions terribles et une nouvelle guerre enflamme le monde. C'est un homme de 50 ans qu'on voit sur cette photo, mais son regard, son front plissé montrent un homme marqué par la douleur et la maladie (ses poumons attaqués à l'ypérite sur le front seront plus tard à l'origine de son décès)

Pierre Ernest vers 1950
Pierre Ernest a une soixantaine d'année sur cette photo. C'est un homme usé ! Alors que les photos de ses parents au même âge montrent des personnes reposées, on voit à quel point 4 ans de front et 5 années de privation et d'angoisse ont pu marquer son visage.

Quel écart entre l'insouciance des années 14 et cette figure presque hugolienne des années 50 !


Pour compléter le tableau, voici une lettre que j'ai retrouvée dans les archives familiales. Elle est datée du 28 octobre 1918.





En voici la transcription :


"Le 28  8bre 1918


Ma petite femme chérie,

                                  Allons, c'est un tout petit 
peu calmé aujourd'hui mais pas pour longtemps
je crois. Merci de tes lettres qui m'arrivent en
ce moment très en retard, mais enfin je les ai.
Je me désole de ne pouvoir t'envoyer qu'un mot
chaque jour ou même rien du tout.
                                  En ce moment j'ai un 
mal fou à toucher tout mon argent, on me doit
quelque chose comme 80f soit en timbre ou en
espèces. Pense que je n'ai pas encore mon indem
nité de permission c'est à dire 46f. Je rouspète je
t'assure. D'autant que je n'ai pas du tout l'in
tention de leur en faire cadeau.
                                  Je t'en prie prends bien
garde à toi car avec cette grippe on ne sait ja
mais.

(...)"


Si j'ai voulu présenter cette lettre, c'est pour montrer une autre réalité de la guerre, la vie de tous les jours, les tracas de la vie, des retards dans le paiement des soldes, et le bon sens qui reste (malgré tout) à ces gens !

Mais c'est aussi pour cette trace discrète de la terrible épidémie qui a déjà commencé à faire des millions de morts, la grippe espagnole. Heureusement, aucun membre de ma famille n'en a été victime, mais la simple mention de cette maladie dans ce courrier montre qu'elle était bien à l'esprit des gens de l'époque !


A voir ces photos, à lire ces courriers, je comprends pourquoi nos aïeux avaient nommé cette boucherie la Der des Ders ! Malheureusement pour eux, une vingtaine d'années plus tard une autre guerre allait commencer. Mais nous devons malgré tout porter ce message d'espoir à nos enfants pour qu'ils ne replongent pas dans cette folie ...


Et vous, avez-vous des témoignages directs de la Grande Guerre ?

Pour aller plus loin : 


           

mardi 2 juillet 2013

Quand tout est simple ...


La semaine dernière, je parlais de mon arrière-arrière-grand-mère, Euphrasie Trochon. J'avais retrouvé pas mal de documents relatifs à sa jeunesse lors du déménagement de la maison de sa petite-fille, ma grand-mère maternelle.

En mettant à jour mon arbre généalogique avec ces informations j'ai alors réalisé que je n'étais remonté pour elle que sur sa branche paternelle. Or si je remontais assez loin par les Trochon, je m'étais arrêté à sa grand-mère paternelle, Françoise Bouleau, née le 3 août 1800 à Avesnières dans la Mayenne et décédée la 15 mars 1879 à Changé, également dans la Mayenne.

Laval en Mayenne


Il était donc temps que je tâche d'en savoir davantage sur l'ascendance de la belle Euphrasie du côté Bouleau.

L'acte de mariage de Françoise Bouleau avec Jean-Baptiste Trochon, en date du 23 novembre 1818 à Changé m'indiquait qu'elle était la fille de Michel Bouleau et de Françoise Louise Levêque. Michel Bouleau était tisserand à Changé.
Le fait que Françoise Bouleau soit décédée à l'âge de 78 ans était peut-être la conséquence d'un atavisme familial puisque son père, Michel Bouleau, était décédé à l'âge de 72 ans et sa mère Françoise Louise Levêque à 70 ans, ce qui était finalement pas mal pour des gens nés sous l'Ancien Régime, ayant pleinement vécu la Révolution Française (puisqu'ils avaient tous les deux une quarantaine d'années en 1789) et habitant près des territoires Chouans.

Mais la bonne surprise est venue lorsque j'ai entrepris de retrouver l'acte de naissance de Michel Bouleau et de celui de sa femme Françoise Louise Levêque.

En effet, si Michel Bouleau était originaire de la paroisse d'Avesnières, Françoise Louise Levêque était native de celle de Changé. Or, dans cette paroisse, une personne a eu l'excellente idée de tenir des tables annuelles et nominatives des baptêmes, mariages et sépultures pour la paroisse. Mais, n'ayant pas fait les choses à moitié, ces tables sont tenues :
  • de 1583 à 1788 pour les baptêmes
  • de 1627 à 1786 pour les mariages
  • de 1627 à 1787 pour les sépultures
Et j'allais utiliser ces tables !

Première découverte : Françoise Louise Levêque est née le 15 novembre 1759 à Changé du mariage de Michel Levêque et de Marie Dubois. Je n'ai pas trouvé grand chose pour le moment sur Michel Levêque mais il semble qu'il soit issu d'un milieu assez aisé car sur son acte de naissance il est dit fils "d'Honnête Homme Michel Levêque", marchand tissier et de "dame Renée Loyand". Ces épithètes ne sont bien entendu pas signe de noblesse, mais signe d'un certain statut social. Nous dirions aujourd'hui que ses parents sont des CSP + !

Michel Levêque fils est donc né le 10 octobre 1726, toujours à Changé de Michel Levêque, maître marchand tissier et de dame Renée Loyand.

Signature de Michel Levêque père en 1726


Toujours grâce aux tables annuelles "magiques", j'ai trouvé en moins de dix minutes que le mariage des parents avait eu lieu le 28 septembre 1723, à Changé et, ces personnages étant des notables, il y est donné force détails dont leur ascendance. On note aussi un grand nombre de témoins qui tous signent ...

Les signataires du mariage Levêque-Loyand en 1723



Michel Levêque père est ainsi  le fils de François Levêque, également marchand tissier et de Françoise Cordier, tandis que Renée Loyand est la fille de maître Noël Loyand, notaire royal, et de Suzanne Ricoul.

Continuer sur la généalogie de ces personnes nous mènerait trop loin, mais il faut savoir que Suzanne Ricoul est elle-même la fille de maître Jean Ricoul, notaire et sergent royal à Changé. Ce dernier vivait dans la première moitié du XVIIème siècle du jeune Louis XIII.

Le seconde bonne surprise est que les familles Loyand et Ricoul étant des familles de notables, il existe une très riche documentation extra-registre à leur sujet. Je n'ai donc pas fini d'explorer la toile et ses méandres ni le site de la BNF ...

On retrouve également une caractéristique de l'Ancien Régime (mais qui a perduré) qui est le respect de l'adage "qui se ressemble s'assemble" car dans le cas présent on a une alliance entre une famille de marchands tissiers et une famille de notaires royaux.

Toutes ces découvertes, et Dieu sait que je n'ai commencé qu'à égratigner la surface du trésor, ont été faites grâce à ces tables annuelles qui m'ont permis d'aller extrêmement rapidement ! Mais il faut mentionner également la très bonne tenue d'archives paroissiales anciennes (relativement) bien écrites.

C'est comme cela qu'on aimerait que les recherches généalogiques se passent ! Cela fait oublier les heures de recherches pour un acte ! Je vais donc en profiter et ne pas bouder mon plaisir en complétant cette branche.

Décidément, ma chère bisaïeule m'a réservé de bonnes surprises !

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