mardi 29 juillet 2014

Drame à Béthisy


Stèle funéraire en mémoire des parents de Hierosme Carrier - Source Wikipedia


En ce mercredi 30 août de l’an de grâce 1645, jour de la Saint Fiacre et seconde année de la Régence de la Reine Anne d’Autriche, mère du jeune Louis le quatorzième, la foule se presse devant l’église de Saint-Pierre de Béthisy. La chaleur est étouffante et les tenues légères des laboureurs et autres hommes de la terre contrastent avec les vêtements lourds et empesés des bourgeois et des notables locaux.

Aujourd’hui, la messe est célébrée par vénérable et discret messire Jacques Mariage, curé de la paroisse depuis près de 15 années. Tout se passe très bien pendant la cérémonie, mais à la sortie, est-ce la chaleur lourde dans l’église ou le soleil de cette fin août qui frappe encore très fort, toujours est-il que maître Hierosme Carrier, le Procureur du Roi de la présente châtellenie s’interrompt en plein milieu d’une phrase alors qu’il était en train de parler à un de ses greffiers.
Ses yeux roulent et il balbutie quelque chose d’incompréhensible avant de s’écrouler lourdement.

Aussitôt c’est la panique. Les femmes se mettent à crier, les enfants à pleurer et il n’y a que son fils Bernard qui appelle maître Nicolas Louis, le chirurgien, pour aider son père à se relever. Mais celui-ci, quoique respirant encore est inconscient et ne peut être remis debout.

Des hommes aident alors le fils du procureur et le chirurgien à hisser le corps de maître Hierosme sur une carriole. Celle-ci quitte précipitamment la place de l’église pour rejoindre le logis du procureur du Roi qui respire faiblement.

Une fois le cortège arrivé en la maison Carrier, maître Hierosme est porté à sa chambre et le chirurgien maître Louis peut enfin l’examiner. Après quelques minutes, il se tourne vers Bernard Carrier son fils et lui dit d’une voix grave : « Mon ami, je crains que votre père ne soit victime d’une attaque d’apoplexie. Il n’y a rien à faire d’autre que de prier pour son âme qui va bientôt quitter ce corps. »

Jeanne Bergeron, la femme de maître Carrier vient d’entrer dans la chambre accompagnée d’une servante. Elle ne dit rien et regarde le corps moribond de son mari sans dire un mot. Elle se retourne vers son fils et lui dit : « Mon fils, voici que le destin nous frappe à nouveau. Après la mort  de ton frère Jean il y a 4 ans, ton père n’était plus le même homme. Aujourd’hui, il va bientôt rejoindre ses aÏeux. J’ai envoyé Pierre quérir le curé pour préparer ton père à rencontrer le Très-Haut. »

Quelques heures après ce drame qui a choqué les habitants du bourg, le calme est revenu et des messagers de la châtellenie arrivent au logis de maître Carrier pour s’enquérir de l’état de santé de ce dernier. Il faut dire que le Procureur du Roi en la châtellenie de Béthisy et Verberie n’était pas jeune et avait même atteint un âge avancé. Mais avec les années, les habitants de la paroisse s’étaient habitués à sa présence et personne ne pouvait envisager sa disparition. Son grand âge et son expérience l’avaient rendu très humain et bien qu’il défendît toujours les intérêts du Roi ses requêtes étaient souvent accueillies positivement.
Le sieur du Hazoy, monsieur d’Anthonis, l’appréciait  grandement et se reposait entièrement sur lui pour les affaires de justice de la châtellenie.

Bien sûr, son fils Bernard allait prendre la suite et sur un plan pratique, rien n’allait changer, mais sa disparition allait quand même laisser un grand vide.

En début de soirée, messire Mariage est arrivé au logis de maître Carrier et s’apprête à le confesser. Mais ce dernier est toujours inconscient. Impossible donc dans ces conditions de le préparer dignement à son arrivée dans le royaume des cieux. Cependant, messire Mariage et un grand nombre de témoins peuvent attester de la grande foi de maître Carrier qui se rendait à la grand’messe dominicale et aux messes consacrées aux saints patrons de la paroisse.

Et puis, messire Mariage n’avait-il pas entendu le Procureur du Roi en confession pas plus tard qu’hier ?

La veillée se déroule dans le calme et la chaleur de la journée fait bientôt place à une fraîcheur agréable. Hierosme Carrier a été déshabillé et il est à présent recouvert d’une simple chemise de lin blanc. Sa respiration est faible mais régulière et maître Louis qui le veille s’inquiète de l’ombre qui commence à marquer le contour de ses yeux. Il se retourne vers messire Mariage et lui glisse « Je crains qu’il ne passe avant deux jours. Ma science ne peut rien contre ce mal. Je vous le confie donc mon père. »

Dans la cuisine, on s’affaire. La cuisinière et ses aides préparent un grand repas pour servir à manger aux nombreux visiteurs qui se pressent et qui seront encore plus nombreux demain. Car personne ne doute que le maître de maison passera cette nuit ou demain.

Pourtant la journée du jeudi dernier jour d’août se passe dans le calme. Rien n’est à signaler si ce n’est quelques légers tremblements du bras du malade. Son corps est presque immobile.

Le Bailli en personne est venu rendre visite à son vieil ami et il est prévu que Monsieur  d’Anthonis lui-même passe en fin de journée.

Tout le monde parle à voix basse comme si on avait peur de gêner le mourant puis le brouhaha s’estompe, laissant la place au silence de la nuit.

La cloche de l’église vient de sonner les matines quand maître Louis remarque un léger affaissement du visage du malade. Il s’approche du visage et colle son oreille sur la bouche de Hierosme Carrier : pas un souffle. Il appelle alors une servante lui demandant d’aller rapidement lui chercher un bol de vinaigre, mais l’odeur âcre du liquide laisse le visage sans réaction. Il pince alors violemment l’orteil droit, pas de réaction.

Se retournant alors vers Bernard Carrier et Jeanne Bergeron qui viennent d’entrer dans la chambre, il leur dit d’une voix rendue rauque par la fatigue accumulée : « S’en est fini. Son âme est à Dieu. » Une larme coule sur la joue de Jeanne tandis que Bernard sert les poings pour contenir sa tristesse.

Messire Mariage arrive juste du presbytère et ne peut que constater le décès à son tour. Les prières d’usage faites, le corps est laissé aux proches qui vont en effectuer la toilette.

A peine deux jours après le drame vécu par les habitants de la paroisse, les voilà de nouveau rassemblés devant l’église où arrive le cortège funèbre. Seulement cette fois-ci la foule s’est enrichie des notables et nobles personnes des environs, venus rendre un dernier hommage à celui qui a occupé la fonction de Procureur du Roi en la châtellenie et de Garde des Sceaux du baillage de Béthisy pendant de nombreuses années. On retrouve en effet Monsieur François d’Anthonis et Damoiselle Catherine de Nancelles, le sieur et la dame du Hazoy, le Bailli, un représentant de l’Evêque de Soissons et tous les officiers du greffe accompagnés de leurs épouses.

Comme il se doit, Maître Hierosme Carrier sera inhumé dans l’église, à côté de ses parents Denis Carrier et Florence Bergeron qui y reposent déjà depuis plus de 40 ans …

Petit à petit la foule quitte les lieux et seuls restent dans l’église, devant  la stèle funéraire dont les joints sont encore frais, Bernard Carrier et sa femme Anne Colas accompagnés de leurs enfants. Anne a un léger frisson et elle fait signe à son mari qu’elle souhaite sortir. Il faut dire qu’elle est sur le point d’accoucher de son huitième enfant.  Le couple et ses enfants sortent enfin de l’église. En voyant maître Louis le chirurgien qui a accompagné son père dans ses derniers moments, Bernard se promet d’aller le voir sous peu : ce sera le parrain de cet enfant à naître. Il lui doit bien ça …

Epilogue :

Hierosme Carrier, Procureur du Roi en la châtellenie de Béthisy et Garde des Sceaux audit Baillage de Béthisy est né vers 1577. Il était fils de Denis Carrier, aussi Procureur du Roi et de Florence Bergeron. Il a épousé Jeanne Bergeron, fille d’une grande famille d’officiers royaux de la région. 

Son fils Bernard sera Sergent royal puis Procureur à la mort de son père héritant ainsi de sa charge. Jeanne, la fille de celui-ci, baptisée le 17 septembre 1645, soit environ 2 semaines après la mort de Hierosme se mariera plus tard avec Jean Patour

Cette branche de ma famille se mélange avec celle des Louis puisque Nicolas Louis, chirurgien à l’époque des faits est non seulement un de mes ancêtres directs mais a effectivement été le parrain de Jeanne Carrier

Ainsi, bien avant que les descendants de Hierosme Carrier et de Nicolas Louis ne se soient unis le 21 juin 1884, des liens existaient déjà entre ces deux familles 240 ans auparavant …

Les sources historiques de cette histoire sont le registres des BMS de Béthisy-Saint-Pierre et la stèle funéraire de Denis Carrier et de Florence Bergeron érigée par Hierosme Carrier et son frère Michel en mémoire de leurs parents. Cette stèle est actuellement visible dans l'église de Béthisy-Saint-Pierre.

Pour le reste, j'ai laissé mon imagination relier ces éléments ...


Si cette histoire vous a plu, n'hésitez pas à la diffuser ou à la commenter !

  


mardi 22 juillet 2014

Actes anciens et nombres


En principe tout le monde a appris à l’école que les Romains utilisaient des lettres pour écrire leurs chiffres et ainsi composer des nombres avec un système qui n’est pas un système décimal. En effet, le système romain ne connaît que 7 signes qui sont :
  • I pour 1
  • V pour 5
  • X pour 10
  • L pour 50
  • C pour 100
  • D pour 500
  • M pour 1 000


Ensuite, en utilisant les formes additives ou soustractives on peut ainsi écrire tous les nombres entiers. Par exemple 2014 s’écrira MMXIV ou MMXIIII, même si la première forme est la plus courante.

Arche de Titus


Or il se trouve que dans beaucoup de régions, jusqu’au début du XVIIème siècle, le latin étant la langue utilisée par l’église dans ses documents officiels, les prêtres et curés officiant dans les paroisses de nos ancêtres utilisaient le latin pour leur liturgie mais également pour noter les baptêmes.
Pour les régions où j’ai des ancêtres, j’ai pu constater que l’usage des chiffres romains pour noter les dates a disparu à partir des années 1620, mais je sais qu’il existe des régions où cet usage a duré jusqu’au XVIIIème siècle.

Le problème sur ces actes anciens n’est donc pas de tomber sur des dates écrites en chiffres romains, mais bien de les déchiffrer car les curés avaient tendance à lier les lettres entre elles et à avoir des mouvements de plume déformant fortement ces chiffres !

Par ailleurs, pour noter le chiffre « 4 » la forme additive était plus souvent utilisée, c’est-à-dire que le curé écrivait « iiii » plutôt que « iv » tandis que pour 9, le curé écrivait presque toujours avec la forme soustractive, soit « ix » au lieu de « viiii ».

Le fait que les lettres étaient liées et assez déformées est dû à l’utilisation de la plume où il était plus simple de laisser cette dernière courir sur la feuille plutôt que de marquer un espace entre chaque lettre, ce qui aurait pu causer la chute d’une goutte d’encre. Un peu comme de nos jours où on écrit généralement en lettres liées plutôt qu’en écriture « bâton ».

Il ne faut donc pas être décontenancé par ces signes qui peuvent sembler incompréhensibles à première vue.

Un truc que j’utilise et qui marche bien est de créer dans un tableur un calendrier pour chaque année ancienne. Ainsi, je sais par exemple en un coup d’œil que le 22 août 1618 était un mercredi. Ceci est très utile si le curé écrit le jour de la semaine devant la date : cela permet de lever le doute quant au quantième du mois.

Pour celles et ceux qui tomberaient la première fois sur des textes anciens comportant des chiffres romains revus à la mode Grand Siècle, voici quelques exemples de graphie.


Le nombre 18, écrit xviii

On notera la déformation du « x » qui le fait ressemble à une sorte de petit T majuscule et le dernier « i » qui s’envole formant un V, mais il ne s’agit là que d’un effet artistique …


18 = xviii

Le nombre 13, écrit xiii

On notera les points sur les « i » qui permettent de distinguer la série des trois « i » avec les jambages d’un « m ».


13 = xiii

Le nombre 27, écrit xxvii

On notera l’usage de la forme additive conforme à la numérotation romaine et encore une fois des « x » déformés ainsi que l’envolée du dernier « i » qui le fait ressembler à un V.


27 = xxvii

Le nombre 4, écrit iiii

On notera l’usage de la forme additive et l’existence de points sur les « i » pour signifier qu’il s’agit d’une suite de 4 « i » et pas d’une sorte de « m » avec un jambage surnuméraire. Encore une fois, le  « i » final s’envole …


4 = iiii

Ces quelques exemples montrent que finalement il n’est pas trop difficile de déchiffrer ces nombres. Surtout si on parcourt les registres, ce qui permet de se familiariser avec cette forme d’écriture. L’autre avantage d’une lecture exhaustive des registres est qu’elle permet de situer un nombre entre celui de l’acte d’avant et celui d’après. Cela peut aider au déchiffrage …


En tout cas cet exercice montre qu’il n’y a pas si longtemps que cela (que sont 400 ans à l’échelle humaine …), nos ancêtres avaient encore devant eux des témoignages concrets de l’époque romaine. Ainsi l’influence de cette civilisation sur la nôtre a été beaucoup plus forte qu’on peut l’imaginer …

Et pour vous, jusqu’à quelle époque avez-vous des actes contenant des chiffres romains ?



Pour aller plus loin :




           

mardi 15 juillet 2014

De l’intérêt des relevés des registres paroissiaux


Lorsqu’en janvier dernier je me suis lancé dans le relevé des registres de baptêmes, mariages et sépultures de Béthisy-Saint-Pierre dans l’Oise, je savais vaguement où j’allais, m’étant fixé le cadre temporel de ces recherches, mais j’ignorais en revanche où cela allait me mener précisément.

Tout d’abord, alors que je pensais m’arrêter, contraint et forcé par les sources disponibles, en 1617, j’ai découvert que parmi les ressources en ligne sur Geneanet, il y avait les registres complets de 1587 à 1616 … Cela me permettait donc de faire un nouveau bon dans le passé et, accessoirement, de trouver les plus anciens actes de baptême de ma généalogie, comme celui de Bernard Carrier, né le 10 juin 1604 et fils de Jérôme Carrier, procureur du Roi et Garde des Sceaux de Béthisy, et de Jeanne Bergeron.

Procession de la Ligue en 1590 - Une vision des costumes de l'époque ...


Ensuite, j’ai découvert plusieurs annotations des curés qui se sont succédés et qui décrivaient ci et là la vie de tous les jours dans leur paroisse. Il y a eu évidemment les grandes campagnes d’abjuration, mais il y a eu les visites de l’Evêque qui ont permis aux adolescents de la paroisse de recevoir leur confirmation.

Mais j’ai surtout pu identifier plusieurs de mes ancêtres et leur descendance en constatant d’ailleurs que quelques générations plus tard, il y a eu un nombre assez important de mariages entre cousins ! Mais la distance entre ces cousins était alors telle qu’il n’était pas nécessaire de demander une quelconque dispense.

Et puis, comme mon but était de relier entre eux les différents paroissiens, de mesurer les relations qui existaient entre eux, je dispose maintenant d’une base assez conséquente puisque sur la période qui va de 1617 à 1747, j’ai relevé à ce jour 3 457 baptêmes, 858 mariages et 2 328 sépultures.

Un cas pratique est celui de la famille Populaire. J’ai en effet dans ma généalogie une Marie Populaire qui a épousé Pierre Choron à la fin du XVIème siècle et qui a eu pour enfant Jean Choron, le sosa 9436/10144 de mes enfants, né le 13 février 1601.
Je sais que Marie Populaire est décédée le 24 mars 1649 à l’âge de 72 ans (ou environ), ce qui la fait naître vers 1577. Son mari Pierre Choron étant décédé le 1er mai 1647 à l’âge de 85 ans, il a dû naître vers 1562.
Marie Populaire était âgée de 24 ans ou environ à la naissance de son fils, elle a donc dû se marier vers 1600.  

Ce patronyme étant assez peu courant dans la région, j’ai voulu en savoir plus. Cela m’a permis de mesurer l’intérêt de ma « base de données »… En effet, un simple clic et je trouve que quatre filles portant ce nom sont nées au début des années 1600 (sachant que pour le moment, je n’ai dépouillé que l’année 1587 et que j’ai survolé le reste de la période 1588-1616), à savoir :

  • Michelle Populaire, née le 30 juillet 1614
  • Laurence Populaire, née le 3 octobre 1617
  • Catherine Populaire, née le 21 juillet 1621
  • Marguerite Populaire, née le 10 avril 1624


Tous ces enfants, sont les filles de René Populaire et d’Hélène Dubois.

Concernant les parents de ces enfants, je trouve que René Populaire est décédé le 9 septembre 1625 à l’âge de 52 ans, ce qui le fait naître vers 1573, tandis que son épouse Hélène Dubois est décédée le 29 mai 1645 à 54 ans, ce qui signifie qu’elle était donc née vers 1591. Après le décès de son mari, elle s’est remariée avec Nicolas Colas le 5 août 1632.

Par ailleurs, dans les registres de 1587 à 1616, on trouve des enfants nés d’un mariage entre un René Populaire et une Perette Colas. Mais les naissances sont antérieures à 1614, ce qui peut laisser penser que René Populaire s’est marié une première fois avec cette Perette Colas, a eu des enfants avec elle et qu’il s’est marié ensuite avec Hélène Dubois, après le décès de sa première épouse, ce qui peut expliquer l’écart d’âge entre le mari et la femme (18 ans environ).

Toujours est-il que, autant le patronyme Dubois est relativement fréquent à Béthisy-Saint-Pïerre au début du XVIIème siècle, autant celui de Populaire est rare. Il semble donc que ce soit René Populaire qui soit à l’origine des porteurs de ce nom dans cette paroisse !

Mais revenons aux quatre filles.

Michelle n’a pas de postérité sur la paroisse et on perd sa trace assez vite.

Laurence épouse Crespin Baudequin le 21 juin 1636 et a 8 enfants avec lui entre 1639 et 1653. A noter que deux de ses enfants ont pour marraine respectivement Catherine Populaire et Marguerite Populaire. Au vu de la rareté du patronyme, on imagine que ce sont les sœurs de Laurence
Laurence s’éteindra le 12 avril 1653 à l’âge de 40 ans selon le curé, mais en réalité à l’âge de 36 ans …

Catherine épouse Denis Colas le 19 février 1645 et a 9 enfants avec lui entre 1645 et 1661. Sachant que les registres sont lacunaires entre 1662 et 1668, il est possible qu’un autre enfant ait vu le jour … Là encore, on trouve que Marguerite Populaire a été marraine deux fois.
Catherine mourra le 15 mai 1684, étant veuve de Denis Colas, à l’âge officiel de 63 ans, pour en réalité un âge de … 63 ans !

Marguerite enfin, la trois-fois-marraine, épouse Noël Didelet le 11 février 1646 et de cette union naîtront 6 enfants entre 1646 et 1661, avec peut-être d’autres entre 1662 et 1668 … Catherine Populaire est la marraine d’un de ses enfants.
Marguerite décèdera le 29 avril 1696 étant veuve de Noël Didelet en premières noces et femme d’Henri Dupuis en secondes noces. L’acte de décès de Noël Didelet et celui du mariage d’avec Henri Dupuis étant introuvables, on peut imaginer que ces deux événements se sont produits entre 1662 et 1668. En tout cas selon son acte de sépulture Marguerite est censée avoir 73 ans à son décès alors qu’elle en avait en réalité 72. On est donc très proche de la réalité.

On se retrouve donc avec 23 enfants (dont un grand nombre décèderont en bas âge) à la troisième génération. Notre couple René Populaire et Hélène Dubois a donc eu au moins 23 petits-enfants, si on admet que quelques naissances supplémentaires ont pu avoir lieu pendant la période lacunaire de 1662 à 1668.

A ce stade de mes recherches, je n’ai pas poussé mon étude plus loin car je souhaite d’abord en savoir plus sur le couple René Populaire-Perette Colas qui a vécu dans les années 1590-1600.


Mais cette ébauche montre tout l’intérêt qu’il y a à effectuer un relevé systématique des actes de baptêmes, mariages et sépultures d’une paroisse. Cela permet ensuite de dresser une généalogie descendante pour chacun des personnages identifiés dans les temps les plus lointains et voir ensuite les jeux d’alliances entre familles.
Ce travail est rendu possible par le fait que l’ensemble des informations disponibles offre une vue globale et complète. Il est alors possible d’établir des liens et des corrélations entre des faits et des personnes qui ne seraient pas possibles en étudiant les actes de manière éparse.


Alors, êtes-vous prêt(e) à faire un relevé de paroisse ?



Pour aller plus loin :



           

mardi 8 juillet 2014

Démocratie et Ancien Régime


Si on regarde l’histoire de France rapidement et dans les grandes lignes, on se dit que la Révolution Française, outre qu’elle a aboli les privilèges de la noblesse et du clergé, a doté la nation d’une constitution et a permis d’instaurer la démocratie.

Il s’agit évidemment d’un raccourci  qui non seulement ne décrit pas la réalité : la démocratie au sens où nous l’entendons aujourd’hui avec le suffrage universel est très récente et la notion de liberté qui est souvent associée dans notre inconscient collectif avec celle de démocratie n’était pas vraiment de mise lors de la Terreur …

La question qu’on peut alors se poser est la façon dont fonctionnaient nos villages et bourgs sous l’Ancien Régime. Je parle volontairement de villages et de petites paroisses car Paris et les grandes villes ne sont pas toujours représentatives de ce qui se passait dans le reste du royaume.

Eglise de St Céneri le Gerei - Crédit chtoric67


J’ai récemment lu (ou plutôt parcouru quelques heures durant) deux ouvrages écrits en 1882 par Louis Marie François Guiller, chanoine titulaire de Laval et qui traitent de l’histoire religieuse et féodale de Changé-lès-Laval, paroisse jouxtant Laval et de nos jours réduite à un quartier de cette ville.

Il est clair que les idées politiques de notre auteur guident son récit, mais il cite tellement de sources précises et d’actes de toutes sortes qu’on peut cependant considérer les informations qu’il donne comme fiables.

Ainsi,  notre chapelain nous apprend que :


« (…) les affaires paroissiales à cette époque (XVIIème siècle) étaient réglées par le général des habitants, réunis en congrégation ou assemblée, à l’issue de la grand’messe. C’étaient dans ces assemblées que se donnaient les baux tant des immeubles, pré, closeau, maisons et jardins (…) »


Et plus loin :


« Dans chaque paroisse existait un procureur-marguillier et un procureur-syndic (élus pour 2 ans dans la paroisse de Changé). C’était à la diligence du premier que le général des habitants était convoqué, quand il s’agissait des affaires de la fabrique, des réparations à exécuter aux bâtiments de l’église et au clocher, ou des décorations intérieures de l’édifice sacré. Lorsqu’il s’agissait des affaires intéressant la communauté entière, le procureur-syndic provoquait les assemblées générales, qui se tenaient le dimanche, à l’issue de la grand’messe paroissiale, après convocation faite au prône et au son de la grosse cloche. (…) Un ou plusieurs notaires étaient appelés et rédigeaient, séance tenante, par un acte public et authentique, les procès-verbaux de ces réunions, lesquels étaient ensuite signés par les témoins à ce requis et par tous les habitants présents sachant le faire. »


Je dois avouer qu’à la lecture de ce texte, j’ai été vraiment surpris de voir à quelle point ces villages du milieu du XVIIème siècle étaient organisés et modernes ! On est loin de l’image de paysans ignares subissant les prêches en latin du curé qui n’avait que pour but de récolter sa dîme …

Mais, on ne se refait pas et j’ai quand même voulu vérifier ces informations données par ce chapelain.

Et c’est ainsi que je suis allé fouiller du côté de Saint-Céneri-le-Gerei, dans l’actuelle Orne, à environ 80km au Nord-Est de Laval. Il se trouve en effet qu’une partie de ma famille provient de cette paroisse assez atypique et j’ai donc eu l’occasion à plusieurs reprises d’en parcourir les registres paroissiaux.

Je dis atypique parce que dans le dernier tiers du XVIIème siècle, elle a eu comme curé un certain messire Bourdon qui avait comme principe de noter sur ses registres, tous les événements concernant ses paroissiens, y compris lorsqu’un tel passait un contrat avec tel autre. Ainsi, nous avons une véritable annexe des actes notariés car on a un résumé de la transaction, du notaire concerné, du montant de la transaction, etc..

Et évidemment, on a les comptes-rendus des assemblées générales dont parle notre chapelain.

D’ailleurs, je ne résiste pas au plaisir de partager ici le compte-rendu de deux de ces assemblées qui statuaient sur qui allait payer et collecter la taille … Je croyais naïvement au départ que cet impôt était collecté par des officiers royaux ou seigneuriaux, alors qu’en fait les paroissiens s’en chargeaient à tout de rôle … Etonnant, non ?


« Le dimanche trentième jour de septembre mil six cent quatre vingt cinq, devant nous Jacques Bourdon, prêtre curé de St Cénery le Gerei, les paroissiens de ladite paroisse dont les noms ensuivent Pierre Camus, François Marquet, Nicolas Lheraunet, Paul Tousel, René Ribot, Christophe Leurson, Jacques Duval, Vincent Fortin, Gilles Métayer, René Olivier, Michel Petienne, François Fouqué, Nicolas Mercier, étant assemblés à l’issue de la messe paroissiale après le son de la cloche au lieu accoutumé en forme de général ont tous d’un commun consentement nommé pour collecteurs de la taille de l’année suivante  1686 les personnes de Guillaume Marchand, René Cosseron et René Ribot et pour procureur syndic Jacques Duval et ce en présence de Michel Camus, bourgeois d’Alençon et de maître Vincent Fortin, diacre de cette paroisse, lesquels ont signé (…) »


Suit un acte de baptême puis :


« Le dimanche quatrième jour de novembre mil six cent quatre vingt cinq, devant nous Jacques Bourdon, prêtre curé de la paroisse de St Cénery le Gerei, les paroissiens de ladite paroisse dont les noms ensuivent François Marquet, André Mainfray, René Olivier, René le Feuvre, Pierre Touchar, Jacques Duval, Pierre Camus le jeune, Christophe Leurson, Pierre Pitton, Pierre Marquet, Michel Duval, étant assemblés à l’issue de la grande messe paroissiale dudit lieu en la manière accoutumée ont tous d’un commun consentement nommé pour être enrôlés aux rôles de la taille de l’année mil six cent quatre vingt six les personnes de René Fouqué, François Fouqué, René Ribot, Urbain Fouqué, Gilles Buberon et pour être dérôlés René Soutif et Louis Patry l’aîné, la veuve Pierre Vin…, Christophe Leurson le jeune, Pierre Fortin, Jacques Guilpin, Charles Troussard, Marguerite Legros veuve Gabriel Bourdin, à quoi personne n’a contredit.
Fait ledit jour et an que dessus et présence de Maître Vincent Fortin, diacre de cette paroisse et René Coutrel de Moulions, témoins. »


C’est toute la vie d’une paroisse qui s’écrit devant nous avec son fonctionnement interne et un fonctionnement qui semble assez sérieux puisque la communauté décide qui peut/doit payer l’impôt ou non. Et tout ceci sans que cela soit imposé par une quelconque autorité extérieure …

Ainsi, le chapelain Guiller ne se trompait pas lorsqu’il décrivait le fonctionnement de sa paroisse sous Louis XIV. Cependant, il est à mon avis assez rare de trouver des curés qui décrivent autant la vie de leur paroisse dans leurs registres, ces informations étant en principe portées sur les registres tenus par les marguilliers.

Si on s’en tient à la définition d’origine, alors oui, il existait une forme de démocratie dans nos campagnes même sous le règne de celui qui est décrit comme l’archétype du monarque absolu. On découvre qu’en fait, les organisations paroissiales étaient très vivantes et très dynamiques, prenant en main leur gestion et ne reportant à des autorités extra-paroissiales qu’en cas de litige important.
Ces éléments devraient nous faire réfléchir sur la façon dont on enseigne l’histoire de France à nos enfants, mais ceci est un autre débat …


Et vous, avez-vous eu des témoignages de la sorte dans vos recherches généalogiques ?



Pour aller plus loin :
           

mardi 1 juillet 2014

Challenge A à Z 2014 – L’heure du bilan





Il est toujours difficile voire périlleux de dresser un bilan à chaud d’un challenge qui s’est déroulé pendant un mois durant. Pourtant, l’exercice est nécessaire pour mesurer ce qui a été fait et ce qui doit être amélioré.

J’ai donc deux approches :

  • ce que j’en ai retiré à titre personnel
  • ce que les autres ont pu en retirer



Ce que j’ai pu en retirer

Très égoïstement je vais commencer par mes articles.

Ce challenge m’a rappelé que la généalogie était avant tout un plaisir. Aussi, le fait d’écrire des petites histoires sur certains de mes ancêtres a été très agréable car cela m’a permis de mettre un peu de vie sur ces informations assez techniques et froides qu’on a tendance à accumuler dans ses bases de données.

Bien sûr cela n’a pas été toujours facile de trouver l’inspiration, mais j’ai découvert que le fait de faire raconter la vie d’un ancêtre par un tiers pouvait donner un ton « romanesque » à sa vie. Je vais donc, je pense, renouveler l’expérience, mais à plus grande échelle, pour décrire la vie d’une famille par exemple.

Ensuite, j’ai été très agréablement surpris par la qualité générale des autres articles. Surtout que certains étaient très bien documentés et je sais assez ce que représente la rédaction d’un billet pour apprécier le travail réalisé par mes collègues blogueurs !

J’ai découvert des histoires extraordinaires, des lieux, des événements, des anecdotes qui montrent qu’effectivement la généalogie est (et doit rester) avant tout un plaisir …


Ce que les autres ont pu en retirer

Je ne me hasarderai pas à comparer les statistiques de visite de mes billets de cette édition 2014 avec ceux de 2013. En effet, non seulement, la durée de visualisation n’est pas comparable (quelques jours pour ces derniers billets contre plus d’un an pour les autres), mais en plus, les thèmes étant complètement différents, tout cela n’est pas comparable.

La chose que j’ai noté cependant et une certaine régularité quant à la quantité de visiteurs, sauf peut-être pour le premier article de la série qui a eu un plus grand nombre de visites. Sans doute l’effet nouveauté !

Peu de commentaires en revanche, ce qui est somme toute assez normal dans la mesure où les thèmes abordés étaient assez personnels.

Toutefois, si je devais synthétiser les commentaires que j’ai reçus, je dirais que le fait de proposer des petites biographies sur mes ancêtres racontées par un témoin de l’époque a été bien perçu et a même beaucoup plu ! Ce qui est assez rassurant et réconfortant car l’écriture de chaque article a demandé beaucoup de travail en amont. Au point même que j’ai replongé pendant plusieurs jours dans les registres de la Mayenne que j’avais mis de côté depuis quelques mois …


La suite ?

Maintenant que le challenge est terminé, je vais reprendre mes recherches sur Béthisy Saint Pierre (j’en suis au relevé des décès des années 1617 à 1638) mais je vais m’autoriser quelques vagabondages en Mayenne sur les traces de mes plus anciens ancêtres connus à ce jour : les de Chalus et leurs alliés. Je vais donc passer beaucoup de temps sur la période 1550-1650, riche en événements puisque j’ai quand même eu deux ancêtres morts assassinés avec le même mode opératoire, aux mêmes périodes … Quand on sait l’implication des de Chalus dans la Ligue, je pressens quelques liens avec la grande Histoire assez passionnants …

Quant à  l’édition du Challenge A à Z 2015 dont je ne doute pas un instant qu’elle aura lieu, j’ai déjà un thème en tête …


Et vous, qu’avez-vous retiré de ce Challenge 2014 ?