mardi 30 septembre 2014

La vie à tout prix ?


La lecture des archives paroissiales permet parfois de découvrir des faits qui donnent un éclairage particulier sur la vie de nos ancêtres. En fait, on se rend compte à la lecture des comptes-rendus écrits par les curés que l’état d’esprit de nos ancêtres n’était parfois pas si éloigné du nôtre.

Ainsi, je me souviens d’une histoire qui avait défrayé  la chronique il y a quelques années où une jeune femme enceinte venait de décéder suite à un accident mais que l’enfant qu’elle portait étant toujours en vie, les médecins avaient décidé de la maintenir artificiellement en vie jusqu’au terme. Après quelques semaines, la famille a demandé de tout arrêter et l’affaire en est restée là.

Il y a quelques siècles, la médecine n’était pas suffisamment développée pour permettre cela mais l’histoire qui suit montre que la démarche de nos ancêtres était finalement assez proche et pouvait se résumer en une phrase : la vie à tout prix …

Abraham Bosse - L'accouchement (1633) - Crédits BNF


Tout commence à la fin du mois de décembre 1736 dans la paroisse de Béthisy-Saint-Martin dans l’Oise. Pierre Danvin et sa jeune épouse Marie Catherine Duchemin, tous deux originaires de la paroisse voisine de Glaignes sont en visite à Béthisy-Saint-Pierre. Les raisons de ce déplacement nous sont inconnues mais peut-être s’agit-il de voir de la famille car Marie Catherine Duchemin, âgée de 19 ans est enceinte et manifestement à un stade assez avancé.

Les conditions climatiques sont difficiles et c’est sans doute à cause du froid que Marie Catherine Duchemin tombe gravement malade. Comme il était d’usage à l’époque, on appelle donc le curé pour qu’il lui donne le sacrement des malades, plus connu sous le nom d’extrême-onction. C’est chose faite le samedi 29 décembre alors que le couple se trouve à Béthisy-Saint-Martin. Malheureusement la jeune femme décède le lendemain tandis qu’elle est toujours enceinte …

L’acte suivant son acte de décès nous présente alors les suites de cette affaire :

« Le dimanche trentième décembre mil sept cent trente six a été inhumé dans le cimetière de cette paroisse l’enfant de Louis Pierre Danvin et de défunte Marie Catherine Duchemin, habitants de la paroisse de Glaignes, diocèse de Senlis, lequel enfant a été baptisé le samedi vingt neuvième du même mois sur les deux heures du matin, m’étant transporté en la maison du moulin Marin, paroisse de Saint Martin où était ladite Marie Catherine Duchemin ; le Sieur de la Comptée, chirurgien de la paroisse de Béthisy ayant attendu le moment de la mort de ladite Marie Catherine Duchemin pour tirer l’enfant et l’ayant trouvé plein de vie, nous lui avons donné le sacrement de baptême, en foi de quoi nous avons signé le même jour et an susdit. »


Ainsi, le chirurgien a attendu que la mère décède pour sortir l’enfant, ce qui n’a pas dû être une chose aisée. Quant aux raisons pour lesquelles l’enfant a suivi sa mère dans le trépas, on peut imaginer qu’il était soit prématuré, soit qu’il avait subi un important traumatisme au moment de sa naissance. Difficile d’en savoir davantage …

La science et l’église ont toutes deux essayé de sauver cet enfant, même si sa mère venait de décéder. Les raisons qui les ont poussé à agir ainsi sont sans doute différentes mais on peut cependant imaginer que cette volonté inconsciente que chacun de nous a de perpétuer notre espèce n’y est pas étrangère.

Mais la vie reprend ses droits et près d’un an plus tard, le 19 novembre 1737, Louis Pierre Danvin, dont on apprend alors qu’il est âgé de 25 ans et qu’il exerce la profession de marchand chanvrier épouse Marguerite Cadot, sa cadette d’un an. Le mariage a lieu à Béthisy-Saint-Pierre, là où sa première épouse et son enfant sont désormais enterrés. On perd alors la trace de ce couple qui a dû retourner s’installer à Glaignes et, on l’espère pour eux, y passer une vie paisible …


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mercredi 24 septembre 2014

Les revues de généalogie sont-elles (encore) utiles ?


Hier j’ai reçu un formulaire en vue de m’abonner à la Revue Française de Généalogie. Il est vrai que depuis quelques années déjà je ne suis plus abonné à cette revue mais que j’achète de temps en temps (assez rarement) des numéros en kiosque.

En fait, la plupart du temps, je me contente des articles ou des informations sur les nombreux blogs ou sur les différents sites qui existent sur la toile.



Je me suis alors posé la question de la pertinence d’une telle revue ? Est-il nécessaire et utile qu’une telle revue existe encore ? La question subsidiaire étant que si ce type de revue a encore sa place dans le monde des publications, sa forme papier est-elle encore adaptée dans un monde qui tend au tout numérique ?


Thèse

Comme je le disais plus haut, aujourd’hui il existe sur la toile un nombre important de sources permettant de trouver son bonheur. Sans parler des sites dédiés exclusivement à la généalogie (Genealogie, Geneanet, etc.), il existe des dizaines de blogs et de sites de passionné(e)s qui ne se contentent pas de donner des informations personnelles ou publier des trouvailles familiales, mais qui abordent des sujets de fond.

Par ailleurs, le numérique envahit tout et même si le papier résiste, il faut bien reconnaître que beaucoup préfèrent lire un article sur un smartphone, une tablette ou une liseuse plutôt que sur un journal ou dans une revue. Une des raisons à cela est, je pense, l’aspect pratique. En effet, une fois qu’on a lu un article papier, que faire du support ? Le garder, l’archiver ? Si oui, où, comment ? Si non, le jeter au feu, à la poubelle ? Toutes ces questions ne se posent pas pour les documents électroniques, ils nous suivent, sagement stockés dans le cloud ou dans la mémoire de notre appareil …

Enfin, il y a le prix. Pourquoi payer une revue alors que la plupart des ressources dont il est parlé plus haut sont gratuites. Bien sûr, on ne parle pas de sommes importantes, mais à l’heure où chaque euro compte, toute économie est bonne à prendre !


Antithèse

Une revue en général et une revue de généalogie en particulier, est un document papier qui se trouve être en totale cohérence avec les documents que nous manions régulièrement. Il existe bien entendu beaucoup de documents numérisés, mais si on regarde bien, les séries des archives qui sont accessibles en ligne, ne représentent qu’une petite partie de l’ensemble des sources utiles au généalogiste.

Et lorsqu’on a le plaisir de feuilleter un document ancien de quelques centaines d’années à la recherche d’une information, on ne peut qu’éprouver le même plaisir à feuilleter notre revue de généalogie, revenant en arrière, sautant quelques pages, …

Avec les revues de généalogie, pas de problème de réseau ou de batterie (besoins qui, si on en croit certains internautes, constitueraient les fondements réels de la pyramide de Maslow …). On peut la lire en vacances ou au sommet de l’Everest, dans le train ou l’avion. Et puis qui va me voler ma revue ? Tandis que je serre fortement mon smartphone dans le métro craignant qu’une main agile ne me le subtilise ?

Bref, une revue de généalogie, outre qu’elle présente des articles souvent écrits par des personnes sachant rédiger correctement, propose des illustrations de très bonne qualité et surtout peut s’archiver ! On peut y retrouver très rapidement un article écrit il y a plusieurs années car sa structure, avec sa table des matières permet d’être aussi efficace que le plus efficace des moteurs de recherche.


Synthèse

Voici donc venu le temps de la synthèse, ou comme le diraient certains, des compromis.

Bien entendu, le débat reste ouvert et je pense que chacun verra midi à sa porte. Cependant, il me semble que des arguments soulevés ci-dessus, il reste que l’existence d’une revue de généalogie a un sens par ce qu’elle apporte à la culture et à la discipline généalogique.
Ce qu’on peut discuter c’est la forme. Bien sûr, si on prend la Revue Française de Généalogie, elle a son site sur le web. Mais ce site est différent de la revue car il n’en est pas la réplique numérique. On peut acheter la revue en ligne et la télécharger mais ce sont bien deux entités différentes.

Il faudrait donc trouver un modèle économique qui permettrait à l’éditeur de ces revues de proposer en ligne et sous format papier, des informations identiques, même si le numérique permet beaucoup plus de choses que le format papier (insertions de vidéos par exemple).

Je finirai seulement en disant que mes propres recherches généalogiques m’ont permis de trouver parmi mes ancêtres un grand nombre de Normands et que c’est la raison pour laquelle je ne vais pas trancher le débat par un simple billet, je laisserai les commentateurs le compléter …


Et vous, qu’en pensez-vous ?


mardi 16 septembre 2014

Chancres, plaies et autres merveilles


Lorsque j’étais enfant, j’avais une image assez romantique de l’Ancien Régime, imaginant les Rois et les Reines de France en costume fait de matières précieuses et rares, le tout orné de pierres précieuses. Et puis, surtout, ces personnages étaient beaux. Beaux selon nos critères d’aujourd’hui, c’est-à-dire la taille bien faite, le corps svelte et le sourire éclatant.

De même, l’imagerie de mon enfance, présentait une population rurale partagée en deux catégories :

  • celle des travailleurs, bien faits, musclés et le regard intelligent pour les hommes et fines, belles et le visage souriant pour les femmes
  • celle des mendiants scrofuleux,  laids et contrefaits à l’instar du bossu de Notre-Dame.

Visite à l'hôpital - Début du XVIIème


Et puis, les années passant, on réalise que tout n’était pas aussi idyllique et qu’en réalité la plupart de nos Rois et Reines sont morts dans circonstances épouvantables (qu’on pense à Louis XV dont la puanteur du corps au moment de son trépas faisait s’évanouir ses courtisans), qu’ils vivaient de manière effroyable (crâne rasé pour éviter les poux, yeux et peau du visage brûlés à force de les couvrir de vinaigre ou de teinture au plomb). Finalement, beaucoup de nos ancêtres ayant vécu au XVIIème siècle étaient beaucoup plus proches du Jacquouille des Visiteurs que des peintures officielles …

Mais quid des gens du peuple ?

En fait, peu de curés abordent le sujet et il faudrait sans doute se plonger dans les ouvrages médicaux de l’époque pour avoir une idée des pathologies en vogue chez nos ancêtres.
Pourtant, il existe quelques sources grâce à des curés qui, soit par curiosité morbide, soit par goût de l’observation de leurs semblables, se sont plus à décrire la façon dont la maladie avait eu raison de leurs ouailles.

Ainsi, au début du XVIIème siècle, le vénérable et discret messire Delamarre, curé de la paroisse de Béthisy-Saint-Pierre, dans l’actuelle Oise, donne des détails intéressants sur les causes de la mort de ses congénères, sans doute pour justifier également le fait qu’ils n’ont pu observer les rites nécessaires à la survie de leur âme …

Pierre Le Quoy, alors soldat dans l’armée Royale, décède le 23 avril 1617 « ayant perdu la parole, suite à sa maladie » … Conséquences d’un AVC ? Tumeur ? Difficile de savoir avec si peu d’informations.

Marguerite Genys, femme de Valentin Desain est décédée « de mort subite » le 19 mai 1617 « ayant le jour même été au marché ». Pourquoi préciser de fait ? Avait-elle fait un effort particulier ayant conduit à sa mort ?

Jean Pya est décédé le 24 novembre 1617 à seulement 30 ans « d’hydropisie ». En d’autres termes, ce jeune homme était malade du cœur et en est mort …

Jean Baillon est mort le 12 février 1618 à l’âge de 22 ans. Ce qui est étonnant c’est qu’il est « tombé malade, a perdu tout jugement et est mort fou » ! Sans doute une maladie ayant affecté le cerveau ?

Gabriel Gruier est décédé le 22 août 1620 des suites d’une « maladie caduque » ! Il semble qu’il s’agisse en nos termes actuels d’épilepsie. Il est sans doute mort étouffé après avoir avalé sa langue.

Nicolas Choron, dit la Jeunesse, boucher de Béthisy est mort le 26 décembre 1620 à l’âge de 46 ans « des suites d’une maladie qui le tenait à l’estomac depuis 15 ans. Il avait reçu les sacrements de l’église il y a plus de 3 mois, avait cessé son métier de boucher et était au lit depuis ». Une mort lente et sans doute douloureuse …

Jeanne Fagnet, veuve d’Hector Collas  est décédée à 70 ans le 21 janvier 1622 « d’une maladie qu’on nomme vulgairement apoplexie ». Une vie longue et une fin rapide …

Nicolas Boileau est mort à l’âge de 48 ans le 16 décembre 1622 « d’un mal qui lui est venu près du nez et qu’on nomme vulgairement chancre » … Encore un qui aurait subi de nos jours une petite opération et qui aurait continué à vivre …

Nicole Caron, la femme de Jean Desengins est morte le 27 mars 1623 « après avoir été malade pendant 11 ans » … Difficile de connaître les causes exactes de son décès, mais cela a dû être douloureux.

Jean Lesueur, le gendre de feu Noël Huiart, est décédé le 25 novembre 1624 « d’apoplexie après n’avoir été malade que 6 heures et demie ». Le curé précise que ledit Jean Lesueur est mort en aidant son voisin à porter du bois … Une crise cardiaque liée à un trop grand effort ?

Jeanne Duclos, veuve de Pierre Collar, est morte le 31 mars 1625, « ayant été malade presque un an de deux plaies, dont l’une près de la cheville du pied droit, par faute du chirurgien qui a coupé à la cheville suite à une opération et qui a causé ladite plaie ». S’agit-il des suites mal gérées d’une opération ?

Emond Sance, décédé le 13 septembre 1627 à l’âge de 46 ans, « de la maladie contagieuse, sa chambrière et deux de ses filles étant mortes auparavant ». On a tendance à oublier que les épidémies faisaient des ravages dans le Royaume à cette époque, un peu comme actuellement au Libéria avec Ebola …

Perette Choron, est décédée le 24 juillet 1654 à l’âge de 45 ans. Le curé écrit pudiquement que « c’était une fille fort incommodée de santé durant le cours de sa vie » … Le fait d’écrire « fille » signifie qu’elle n’était pas mariée, ce que son état de santé peut expliquer …

Ces quelques témoignages montrent que dans une grande majorité, nos ancêtres mouraient de simples infections ou de vieillesse. Quelques fois cependant, les conditions de leur décès étaient telles que le curé se sentait obligé de les préciser. Ces détails morbides donnent toutefois une vision assez crue des conditions de vie de nos anciens et brise à jamais cette imagerie romantique que nous avons apprise il y a quelques années à l’école !

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mardi 9 septembre 2014

Violence conjugale


Un ancien dicton auvergnat dit « Qui prend la fille du voisin en connaît tous les défauts ». En d’autres termes, mieux vaut prendre un conjoint dans sa paroisse ou, à la rigueur dans la paroisse voisine, que dans une paroisse éloignée, au moins on n’a pas de surprise et on sait à qui on a affaire. Et bien que le dicton s’adresse aux hommes, il est également valable pour les femmes.

Pourtant, lorsque Perette Chevalier a été en âge de se marier, c’est à Louvres-en-Parisis à plus de 40 de nos kilomètres qu’elle a été trouver son époux. A moins que ce ne soit l’inverse puisqu’Antoine Brimont est venu à Béthisy-Saint-Pierre pour les épousailles.

Femmes au début des années 1600


D’Anthoine Brimont on ne connaît pas grand-chose si ce n’est qu’il a dû naître quelques années avant l’an 1600. Quant à Perette Chevalier, elle est née à Béthisy vers 1594 du mariage d’Adrian Chevalier et d’Adrienne Thomas et sa famille est déjà implantée depuis des années à Béthisy-Saint-Pierre. Aussi il n’est pas étonnant que ces deux jeunes personnes s’épousent en face d’église le 27 janvier 1620 dans l’église paroissiale de Béthisy-Saint-Pierre.

Il semble qu’au début de cette union tout se passe bien, même s’il faut attendre le 15 février 1623 pour qu’un petit François naisse. Son parrain est Albin Domont et sa marraine est demoiselle Louise Le Caron, la fille de noble homme Jacques Le Caron. Malheureusement le nourrisson décède quelques jours plus tard.

Peut-être est-ce à ce moment qu’Anthoine Brimont devient violent avec son épouse, lui reprochant peut-être une certaine infertilité ? Il doit se dire qu’il aurait mieux fait de prendre une épouse dans sa paroisse … De son côté Perette Chevalier qui approche de la trentaine est sans doute désespérée car elle n’a toujours pas pu donner d’enfant à son mari, et elle découvre peut-être à ce moment-là la violence de son mari …

Le drame se produit peu de temps après le décès du petit François. Sans doute à la suite d’une dispute, dans un mouvement de colère, Anthoine Brimont s’empare d’un pot de grès et le lance en direction de son épouse, l’atteignant à la tête.
Le choc est si violent que Perette Chevalier s’effondre par terre, saignant abondamment de la tête. Il faut que des voisins, alertés par les cris, arrivent pour tenter de redresser ladite Perette mais le traumatisme est tel que peu de temps après, le 2 août 1623, elle décède. Elle avait 29 ans.

Les suites de cette affaire tragique ne sont pas connues, mais ledit Brimont quitte la paroisse de Béthisy-Saint-Pierre et on ne l’y reverra plus jamais. Sans doute aura-t-il refait sa vie ailleurs, à moins que la justice ne l’ait rattrapé et qu’il ait été condamné à quelque peine …

Le fait que le curé de la paroisse ait décrit les circonstances de la mort de Perette Chevalier indique clairement qu’il ne s’agissait pas d’un accident. Son mari est nommément cité comme étant à l’origine de la mort de son épouse. Seule la raison de ce geste n’est pas indiquée. Mais il s’agit là indéniablement d’un acte de violence conjugale.


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mardi 2 septembre 2014

Histoire et généalogie


Pas plus tard que la semaine dernière je publiais un article qui montrait l’importance pour un  généalogiste de disposer de quelques connaissances historiques pour comprendre les raisons profondes d’un usage ou d’une pratique donnée (en l’espèce la généralisation en France des registres paroissiaux à partir de 1668).

Je ne suis pas objectif lorsque je dis qu’un généalogiste doit faire de l’histoire ou en tout cas en maîtriser les fondamentaux, étant moi-même passionné d’histoire. Cependant, je suis convaincu que le fait de connaître l’histoire de son pays, de sa province ou de son village sont  un atout important pour le généalogiste.

Tout revient finalement à se poser la question suivante : et si, faire de la généalogie ce n’était pas faire de l’histoire sans le savoir ?


Hérodote - Source Wikipedia


Contextualiser

Normalement, une fois qu’on a réussi à bâtir l’ossature d’un personnage, en ayant retrouvé son nom et quelques unes des dates clefs de sa vie, on est tenté d’aller plus loin, de comprendre l’environnement dans lequel il a vécu, de connaître les faits qu’il a pu vivre.

Parfois même on a des ancêtres qui sont acteurs de cette histoire qu’on apprend à l’école : un soldat déserteur pendant la bataille de Waterloo, un collecteur de gabelle dans le Maine, un couple obligé d’abjurer sa foi protestante après la révocation de l’Edit de Nantes, etc..

Dans tous les cas, on habille cet ancêtre en le situant dans son contexte. On est alors bien obligé de chercher à en savoir davantage sur la période pendant laquelle il a vécu et sur les faits marquants de cette époque. Non seulement cela nous permet de mieux comprendre les éléments qui figurent sur les documents qu’on a en notre possession, mais en plus cela permet de rendre cet ancêtre plus vivant.


Relier des faits entre eux

Lorsqu’on part d’un ancêtre et qu’on commence à identifier sa descendance et ses alliances on crée une sorte de nébuleuse qui va venir interagir avec d’autres nébuleuses pour fonder un groupe de personnes qui ont été en relation les unes avec les autres.

Que ce soient les liens établis entre des parents et les parrains et marraines de leurs enfants, les fratries, les mariages et remariages, on crée un nombre important d’interactions entre des personnes vivant dans un même lieu (ou en tout cas pas très éloignés les unes des autres) et à une même époque.

C’est ainsi que l’histoire locale peut permettre d’expliquer certains liens entre des familles ou que les liens entre certaines familles peuvent expliquer des alliances entre descendants. Au niveau de la famille on peut donc mieux comprendre l’enchaînement des unions ou des contrats passés entre différentes personnes. Car rien, ou si peu, ne procède du hasard total dans l’histoire de nos ancêtres.


Enquêter

On prête à Hérodote d’avoir inventé le concept « d’histoire ». Pour lui, faire de l’histoire c’était mener une enquête puisqu’en grec ancien, enquête se dit « historiè ». Mais que faisons-nous lorsque nous recherchons une date ou un lieu manquant ?  Nous menons une enquête …

Faire de la généalogie c’est fouiller parmi des centaines voire des milliers d’actes et de documents pour y trouver la pièce manquante au puzzle. Parfois d’ailleurs, la découverte d’une seule de ces pièces permet de donner une cohérence à plusieurs faits qu’on avait plus ou moins réussi à faire coexister, tout en sentant bien que le système ainsi conçu était un peu bancal : c’est une femme qui aurait eu son premier enfant à 13 ans alors qu’après enquête, la femme en question s’avère être la sœur aînée de l’enfant et pas sa mère …

Faire de la généalogie, c’est enquêter sans relâche jusqu’à trouver sinon les preuves irréfutables, au moins un faisceau d’indices suffisamment concordants pour qu’on ait de fortes présomptions. Bref, il faut être un peu têtu et perfectionniste pour faire de la généalogie …


La généalogie c’est de l’histoire

Je vois donc de très grands liens entre la généalogie et l’histoire. Mais peut-être que la généalogie est de l’histoire ? Une histoire locale, familiale, plus ramassée et ayant un impact plus faible sur la population d’un pays que l’Histoire avec un grand « H », mais de l’histoire quand même.
Si on prend les méthodes utilisées en recherche historique on constate sans problème qu’elles s’appliquent parfaitement à la généalogie. Toutefois cette dernière discipline a une caractéristique bien à elle : les liens qui relient ses acteurs à celle ou celui qui la pratique.

Ce lien particulier, génétique, ajoute l’émotion, la tendresse, la colère, bref, toute une foule de sentiments bien humains à une discipline plus neutre et analytique qu’est l’histoire.

La généalogie serait-elle donc de l’histoire avec du cœur en plus ?




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